Guérir, partie 1

par Hoedic

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Cet article est la première partie d’un “dossier” de trois articles.

Tout comme Ebb plus tôt, je viens de terminer la lecture du livre Guérir le stress, l’anxiété et la dépression sans médicament ni psychanalyse de David Servan-Schreiber. Je vais essayer de ne pas trop reprendre les éléments de l’article de Ebb sur le sujet, en essayant de donner une idée plus large du contenu et d’apporter des éléments personnels (Bien entendu, il peut y avoir des approximations dans mon texte. Si vous avez des remarques, des erreurs à signaler, n’hésitez pas le signifier par les commentaires par exemple).

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Guérir le stress, l'anxiété et la dépression sans médicament ni psychanalyse

Juste de manière préliminaire, il est utile de savoir que l’auteur est un psychiatre avec une formation poussée en neuro-biologie lui apportant le bagage nécessaire pour comprendre et expliquer le fonctionnement du cerveau.

Mais de quoi traite ce livre exactement ? Eh bien il traite de méthodes alternatives pour traiter les problèmes auxquels font face les psychiatres et qui prennent de plus en plus de place dans nos sociétés et qui touchent nombre d’entre nous : le stress, les douleurs qui en résultent souvent et la dépression. On ne va pas traiter le sida ni une infection avec les méthodes proposées qui sont :

L’étude du cerveau progresse à grands pas. En 1995 je lisais L’erreur de Descartes d’Antonio Damasio, qui m’initiait au rapport profond entre le cerveau et le corps et le livre Guérir présente, sous un angle plus thérapeutique, certaines avancées depuis ce temps (Antonio Damasio, que David Servan-Schreiber cite d’ailleurs à plusieurs reprises, a sorti depuis un nouveau livre, Spinoza avait raison (je préfère le titre anglais, Looking for Spinoza) qui traite aussi du rapport aux émotions et aux sentiments d’un point de vue cognitif plus technique.).

L’un des aspects de base que présente le livre est l’antagonisme entre le cerveau limbique, la partie centrale du cerveau, que nous avons en commun avec les mammifères et les reptiles, et le néocortex, partie externe propre aux humains et aux animaux les plus évolués.

Le cerveau limbique est présenté comme le cerveau émotionnel, plus précisément c’est lui qui régule tout ce dont nous n’avons pas conscience : système immunitaire, hormones, etc. On y retrouve l’amygdale et d’autres structures du genre. C’est le prolongement du corps.

Le néocortex est lui en charge, par exemple, de la communication et de la modélisation abstraite, deux traits si particuliers chez les humains.

Selon l’auteur, l’harmonie, l’équilibre, une bonne communication entre ces deux entités est cruciale pour un humain. Dans le cas contraire on se retrouve avec des gens au comportement inapproprié et présentant souvent un certain mal être. Cela impacte aussi fortement le corps. En effet, comme l’a révélé Damasio par exemple, le cerveau et le corps forment un tout et s’influencent mutuellement bien au-delà de la simple somatisation. Dans le cadre du livre, il est fait état du système nerveux central avec le sympathique et le parasympathique. Le premier est en charge de l’excitation, c’est l’accélérateur biologique comme le dit David Servan-Schreiber, le second, le parasympathique, représente le frein. Cela se entraine, notamment, des variations du rythme cardiaque.

À noter que l’auteur a eu la bonne idée de mettre sur son site Internet certains exemples qu’il donne dans le livre concernant les différentes techniques. Je vous invite à vous y référer à l’occasion tout en sachant que ce sont sûrement les cas le plus marquant et qu’un cas particulier est toujours à prendre avec des pincettes.

La cohérence cardiaque

Tout humain présente, même au repos, d’infimes variations de la fréquence cardiaque passant facilement de 60 à 80 ppm en quelques battements. Cette variation n’est pas de l’arythmie mais simplement le résultat de l’action des systèmes sympathique et parasympathique et ces variations sont même bonnes. Il a été prouvé que cette variabilité cardiaque décroit naturellement au fur et à mesure de la vie et qu’en dessous d’un certain niveau de variabilité cardiaque, la mort n’est pas loin (ça fout les boules ce truc, mais c’est pourtant valider par plusieurs études).

Chez la plupart des humains, ces variations sont chaotiques. Les deux systèmes se renvoient la balle erratiquement et tendent à faire baisser la variabilité globale, c’est donc plutôt mauvais ! Le stress, la fatigue tendent à accroître cet état de chaos et dégradent la réactivité du système parasympathique, ça accélère bien mais freine assez mal.

L’inverse du chaos est le phénomène de cohérence où la fréquence des pulsations varie de manière sinusoïdale, et ayant pour effet de renforcer le système parasympathique (exemple de chaos et de cohérence ici). Bien que l’approche soit similaire à la relaxation, elle peut être, avec une certaine habitude, pratiquée en toute situation.

Au-delà des cas particuliers, des études ont prouvé l’effet de la cohérence cardiaque pratiquée de manière régulière. Ainsi une étude réalisée sur des cadres en entreprise a montré une baisse des “palpitations” de 47 à 30% des cadres en six semaine pour descendre à 25% au bout de trois mois. Les symptômes de tension sont passés de 41% à 15% puis 6%, l’insomnie de 34 à 6%, le sentiment d’épuisement de 50 à 12% et les douleurs diverses (mal de dos, de ventre, etc) de 30 à 6%. La proportion d’employés si disant anxieux est passée de 33 à 5%, les mécontents de 30 à 9% et ceux se disant en colère de 20 à 8%.

Ça semble presque miraculeux pourtant j’ai personnellement vécu une évolution similaire : vers l’age de 10 ans j’ai commencé à avoir de très fortes migraines (dites “ophtalmiques” car venant par l’oeil) me gênant sur de nombreux plans et me contraignant souvent à m’allonger dans le noir et le silence. Seuls quelques béta-bloquants faisaient parfois de l’effet à condition de les prendre dès les premiers symptômes de migraine. Suite à une étude de fréquence, il s’est avéré qu’il y avait un lien au stress, les crises arrivant souvent le WE ou après des moments particulièrement stressant (comme pour mon père par ailleurs). J’ai donc décidé, sur conseil de mon médecin, de faire 30 minutes de relaxation sur une base quotidienne. L’effet s’est assez rapidement fait sentir avec une disparition progressive des migraines et un meilleur contrôle de la douleur pour les migraines qui se présentaient. Depuis, je n’ai plus trop de migraine. Sachant que c’est un phénomène assez fort durant l’adolescence, il a pu se tasser par lui-même, mais je suis persuadé que la relaxation m’a aidé à controler mon niveau de stress.

Toutefois, comme beaucoup de monde, j’ai eu la flemme de continuer. Mais il est pour moi évident que la relaxation comme la cohérence cardiaque peuvent avoir un impact très positif sur le stress et les douleurs qui vont avec.

D’autres études ont également révélé une augmentation de la DHEA et une baisse de la concentration de cortisol chez les personnes controlant leur cohérence cardiaque.

Vécue quotidiennement, la cohérence cardiaque est présentée dans le livre comme un moyen de contrôler ses émotions et être ainsi plus efficace intellectuellement et dans ses relations en plus de limiter les symptômes psychosomatiques.

Il existe du matériel permettant de tester son niveau cohérence cardiaque, chaos vs. cohérence, mais je suspecte que c’est assez cher !

L’EMDR

Ou encore intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires

On rentre là dans le traitements des chocs émotionnels majeurs et de l’état de choc post-traumatique comme le montrent les exemples.

Je vais commencer par une expérience assez connue, à savoir le réflexe de Pavlov. Prenez des rats et faites-leur subir une décharge électrique en même temps que résonne une puissante sonnerie. Assez rapidement, les rats paniquent dès qu’ils entendent la sonnerie car ils anticipent la décharge électrique. Il est possible de désapprendre ce réflexe chez les rats en activant la sonnerie sans l’accompagner de la décharge électrique. Découverte récente : si l’on enlève le cortex préfontal chez des rats déconditionnés, il se mettent de nouveau à paniquer dès qu’ils entendent la sonnerie.

Conclusion, le lien entre sonnerie et décharge est ancré dans le cerveau limbique alors que le déconditionnement se fait par le néocortex qui contre automatiquement la réaction du cerveau émotionnel. Endommagez le néocortex et les émotions dévalent d’elles-mêmes, sans contrôle. Il en va sûrement de même chez les humains et c’est même le centre de la psychanalyse : les traumatismes restent ancrés profondément et le fait d’en discuter vise à faire “sortir” les mauvaises expériences, à accéder directement au cerveau émotionnel pour lui faire cracher le morceau.

Tout comme le corps physique, le cerveau possèderait des processus d’auto-guérison pour passer au-delà des traumatismes. Toutefois, on a tendance à enterrer les problèmes psychologiques ce qui les amènent parfois à ressurgir occassionnellement par un phénomène d’association (visuelle, olfactive, tactile, etc) des lustres plus tard. La difficulté des analyses orales (psychanalyses et autres) est de ne pouvoir accéder directement au cerveau “émotionnel” qui est toujours voilé par la conscience.

Le livre présente une théorie assez novatrice qui permettrait d’accéder directement aux émotions. Pour avoir vu, lors d’une conférence, un film montrant un cas réel, ça semble assez invraisemblable. Voici comment ça marche : on fait bouger rapidement un crayon comme un pendule devant les yeux d’un patient pendant plusieurs secondes et on le laisse parler par association. Aussi incroyable que cela puisse paraître ce dernier va petit à petit parler librement de ses traumatismes, même quand il n’en avait pas conscience et au bout de quelques scéances il va avoir intégré le traumatisme qui ainsi ne ressurgira plus inopinément.

Le principe est d’utiliser un cheminement proche du rêve. En effet depuis des années, le rêve est considéré comme un intégrateur des événements quotidiens. En provoquant le mouvement occulaire simulant le rêve, on veut recréer cet environnement d’intégration dans un mode semi-conscient.

Ce phénomène laisse vraiment sceptique, y compris parmi les membres de la communauté scientifique, dont de nombreux psychiatres. Pourtant des études de plus en plus nombreuses tendent à confirmer ces résultats. Ainsi une étude chez des patients présentant des traumatismes émotionnels importants a montré un taux de succès de 80% et une évolution dans le temps nettement supérieure à tout ce qu’auraient pu faire des médicaments.

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