Une deuxième semaine

par Dre Papillon

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Lundi 6 juin

Retour en stage du côté des petits. Je fais deux admissions, les deux tournées, assiste à plusieurs échographies cardiaques avec un ennui tout relatif. La journée est marquée par le constat que les médecins du service sont tous d’assez fortes têtes avec de gros caractères. À la réunion du service, j’assiste à plusieurs altercations… Pas très élégant ! Certains médecins sont également relativement brutaux envers les patients et la plupart expliquent peu. L’attitude envers les patients (et collègues) me semble souvent assez hautaine et particulièrement paternaliste. Suis-je dans un service caricatural de ce que je pouvais imaginer, vu son niveau de pointe ?

Mardi 7 juin

Petite journée pépère du côté des petits. Beaucoup de lits sont vides, il y a peu d’entrées. Je descends au bloc pour assister à deux cardioversions (le même genre de choc que pour réanimer les arrêts cardiaques). Impressionnant ! Je subis aussi avec le sourire mais toujours un certain malaise les boutades et taquineries du chef de service. Je n’ose rien dire, rien expliquer aux patients, ni répondre à leurs questions tellement je sens une ambiance tendue et un manque de confiance ; il ne faut contredire personne, même si c’était avec raison. Je ne critique pas mais je n’en pense pas moins. Pourquoi tout ce placotage dans le dos des familles ? Pourquoi rabrouer leurs questions, leur refuser le droit de comprendre, de choisir ? Tout est tellement comme je l’imaginais qu’on croirait que je l’ai déjà vécu dans une autre vie ! En après-midi, j’assiste à la longue réunion du service, presque 4h d’affilées à les écouter marmonner sans toujours entendre ni comprendre d’ailleurs. Je trouve mes journées longues et j’envie les externes français qui se sauvent en fin de matinée.

Ah oui, et un mot tout de même sur l’internat local, i.e. le lieu de vie des internes, là où ils mangent, etc. C’est que c’est folklorique ces choses-là ! Des dessins porno ornent de grands pans de murs, des phrases cochonnes sont barbouillées çà et là à la main. C’est peu esthétique et presque vulgaire, mais ce n’est pas non plus comme si je ne m’y attendais pas ! ;)

Mercredi 8 juin

Petite journée du côté des petits à faire le tour et à remplir des bons d’échographie, etc. J’ai assisté au bloc à un drainage de péricarde chez un bébé que je soupçonne d’être d’origine sénégalaise, il faudrait que je finisse par poser la question à la maman. C’était impressionnant : vraiment délicat comme intervention, aller poser un drain dans l’enveloppe autour du cœur… Le médecin était un peu irascible, surtout envers les infirmières. En après-midi, j’ai suivi un autre médecin qui fait penser à un gentil grand-papa, ou à un nain de jardin, c’est selon ! C’est un grand spécialiste des angiomes (je ne savais pas trop ce que c’était avant d’y aller) et nous avons donc vu plusieurs bibittes à cinq pattes, dont trois fois le même syndrome qui ne doit pourtant pas être courant ! Au moins, si je vois ça un jour, je ne serai pas trop décontenancée…

La journée a été magnifiquement ensoleillée mais encore froide… Les températures ne dépassent pas les 20° ici. Je suis retournée me balader en ville, oû j’ai essayé de demander des informations sur le wifi à l’Office de tourisme (c’était ma dernière tentative), mais quand la fille m’a demandé d’épeler ce que je voulais et m’a proposé de chercher sur Google, j’ai compris que Lille, c’est vraiment le tiers-monde ! Mais son centre-ville est tout de même très vivant et agréable. J’ai enfin fini par tomber sur la FNAC, qui est étrangement très discrète, planquée au milieu d’une petite rue parmi d’autres immeubles… Surprenant.

Jeudi 9 juin

À la fin de mes journées, voilà quelques jours que je vais dans Lille faire de grandes balades, dans les quartiers sympa. C’est très joli, c’est vivant (bondé même, ils ne bossent jamais les Lillois ?), on trouve plein de boutiques. Mais comme je ne suis pas une grande magasineuse, eh bien, je n’achète rien. Il n’y a que les magasins de chaussures où j’entre par principe, au cas où je trouverais quelque chose pour le mariage. Pour l’instant ce n’est pas un grand succès…

Il faut dire que le temps est magnifique, bien que je continue à grelotter sérieusement. Je commence à espérer qu’il fera vraiment si chaud qu’on le dit, au Sénégal, parce que je n’en peux plus de mes muscles tout tendus et de mes doigts bleuis par le froid…

D’un point de vue stage, c’est toujours intéressant, ya de ces cas à l’étage ! Un syndrome de Marfan, un Noonan, un Di Georges dans la même journée, plus notre endocardite qui chauffe toujours et les phéochromocytomes. Certains parents me rendent triste par leur déni de ce qu’a leur enfant. « Ah bon, mais peut-être que la trisomie 21 va s’en aller avec l’opération pour le cœur ? » Comment dire, je ne crois pas non… Hier j’ai aussi vu un cas qui m’a mis arraché quelques larmes, pas pu me retenir ; une petite fille qui n’a vraiment pas de bol, elle a une saloperie au foie doublé d’un infarctus en bas âge (pour ceux qui ne le sauraient pas c’est excessivement rare avant l’âge mûr…), et comme si ça ne suffisait pas elle a été impliquée récemment dans un gros accident de voiture d’où elle a pu être désincarcérée pratiquement indemne, mais elle y a laissé ses deux parents. Pff, la vie est une vraie salope, elle s’acharne sur de si petits êtres parfois, si innocents…

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