Dilemme

par Dre Papillon

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Depuis quelque temps (disons l’an dernier), je souffre d’une certaine gérontophobie médicale. Bon, bien sûr, je vais essayer de l’exorciser parce que dans ma profession et dans la société québécoise d’aujourd’hui et de demain, ce n’est pas très pratique.

Mais tout de même. C’en est au point que je pense souvent m’orienter en pédiatrie à la résidence et pour ma pratique future. J’ai déjà fait deux options en pédiatrie (cardio et dermato) et il faut attendre le mois d’avril pour le stage global dans cette spécialité, auquel j’ai très hâte.

En attendant, je me suis tapée une vraie déprime en commençant mes stages avec la population adulte (concrètement souvent âgée ou très âgée). J’ai retrouvé avec découragement tous ces discours décousus, ces pensées tangentielles ou circonstancielles, cette difficulté à travailler avec une mémoire discordante et des ajouts inutiles (les péripéties de la fille du voisin, le nom de tous les médecins vus jusqu’à ce jour… mais jamais la liste des médicaments dont on aurait tant besoin !). Comme je me détends et comme j’ai du plaisir quand j’ouvre la porte ou le rideau de la salle de consultation et que je tombe sur une personne âgée de moins de 20 ans ! C’est quasi viscéral.

Concrètement, il y a deux façons de pratiquer en pédiatrie ici. Soit devenir pédiatre. Soit devenir généraliste et orienter sa pratique comme on veut après.

Et pour moi, c’était un vrai dilemme. Comprenons-nous, je n’ai jamais aimé les études. Je n’en peux plus d’avoir hâte à la fin des examens, de l’étude formelle le soir, des frais de scolarité. Je veux être libre de faire ce que je veux, où je veux. J’ai hâte d’avoir un salaire à la hauteur du travail que je donne, au lieu de me faire exploiter. Je vois tous mes amis qui ont fait des techniques ou des bacs commencer à vivre pour vrai, s’acheter des condos ou des maisons, faire des voyages, des enfants, se faire plaisir. Et moi je devrais repousser éternellement ce moment ?

Donc j’en ai marre des sacrifices (bon, faut pas trop en avoir marre non plus, yen a encore pour 4 ans minimum !) et j’ai hâte de finir. Je veux juste vivre.

Cette semaine, j’ai parlé avec l’amie d’une amie, qui fait une résidence en pédiatrie à Ste-Justine. Elle m’a décrit à quel point sa vie est une horreur ; elle regrette presque, c’est dire. Des horaires de fou tous les jours, pendant 5 ans. Deux gardes de 24h par semaines, pendant 5 ans. Le fait de se faire toujours pousser à apprendre les maladies les plus rares, à faire de la recherche, à faire une surspécialité, un post-doctorat. Et on vous tire la gueule pendant quelques mois à chaque refus de votre part. Votre manque d’ambition déçoit tellement.

J’ai compris que mes objectifs de vie, mes choix et mes impatiences, ne cadrent pas du tout avec ça. Même si je me laisse prendre au jeu avec l’externat et que je deviens moins récalcitrante, plus compliante, à cette vie de fou. Je dis STOP. Je m’en doutais déjà, remarquez. Je ne me sens pas du tout capable d’offrir encore 5 ans de sacrifice (7 avec l’externat) en plein milieu de ma vie adulte. Alors que je veux tellement aboutir et avoir du bon temps. Alors que j’ai (qu’on a !) tellement de projets et d’envies.

Alors je serai généraliste, c’est vraiment ma place. En plus, c’est une excellente façon de prendre les 2 années à venir de façon plus détendue, sans enjeu majeur autre que de bien faire mon travail et d’apprendre.

Reste à voir la meilleure façon d’orienter ma pratique, plus tard. Mes goûts et mes aptitudes vont encore s’affiner, stage après stage. Une possibilité serait de faire des suivis de grossesse, des accouchements, puis de suivre les enfants qui en découlent tout naturellement.

Mais on verra bien, j’ai encore le temps pour tout ça !

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