Intransigeance médicale

par Hoedic

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Disclaimer - Ce fut énoncé voilà quelques mois mais voici une piqure de rappel: ce blog est désormais un “blog bébé”. Il est fort probable qu’à peu près 99,9% des billets concernent d’une manière ou d’une autre Monsieur, sa vie, ses couches ou toute autre tâche connexe. Si vous venez ici pour entendre parler des anciens sujets, notamment des chats, passez votre chemin, ils n’auront plus qu’une importance marginale.

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Voici le temps de revenir brièvement sur notre expérience hospitalière post-partum. Les éléments qui suivent ne doivent pas être vus comme une critique des personnes qui se sont occupées de nous mais plus du système dans lequel ça se place.

En effet, bien que Dre Papillon soit plus qu’habituée à l’environnement hospitalier, être un patient ou presque reste toujours une expérience différente. Pour replacer le contexte, nous étions dans un hôpital universitaire “mère-enfant” visant à devenir ami des bébés (favorisant le peau-à-peau, l’allaitement maternel, etc.)

Les suites directes de l’accouchement se passent bien. Bien entendu le personnel ne peut s’empêcher de prendre le bébé quelques instants pour le peser mais c’est tout. Pour faire quelques vérification auprès de la maman on donne au papa le bébé en peau-à-peau.

Ensuite nous sommes conduits vers notre chambre, certes ancienne mais complète: un petit lit pour Monsieur, un grand lit pour Dre Papillon et un lit pliant pour moi qui me permettra de demeurer présent tout le long de l’hospitalisation. Rien à dire là-dessus.

Après quelques minutes d’atterrissage la machine démarre pour ne plus jamais s’arrêter. D’abord Monsieur est emmené dans la pouponnière pour une première prise de sang, une injection de vitamine K et pour mettre un onguent pour les yeux. Nous sommes bien d’accord avec ces gestes médicaux, sauf qu’ils auraient pu être effectués dans la chambre (en présence de la Maman qui en l’occurrence était auscultée par une infirmière mais qui reconnaissait déjà assez nettement les pleurs de Monsieur subissant sa prise de sang(Le protocole pour la prise sang semble particulièrement douloureux: on pique le talon avec une aiguille comme les diabétiques le font. Puis il faut presser vigoureusement sur le pied pour faire sortir quelques rares gouttes de sang. Cette étape, qui peut durer quelques minutes est littéralement terrifiante pour le parent assistant à la scène)).

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Pansement sur le talon

Pour ma part j’ai accompagné Monsieur et il devient de plus en plus clair que le personnel souhaite garder Monsieur en observation à la poup’ pour la nuit car il est prématuré… prématuré mais en pleine forme. Autour de moi je regarde: les bébés en observation sont cordés les uns à coté des autres dans leur lit avec un sommeil régulièrement interrompu par les moniteurs qui bippent, les autres bébés qui braillent et les infirmières qui viennent faire des prélèvements à tour de rôle. Le tout avec deux infirmières qui gèrent d’autres chambres en plus et qui donnent le biberon sur un coin de bureau en discutant de leur dernière fin de semaine.

Bref, nous commençons à protester que nous voulons garder Monsieur avec nous pour la nuit, comme il est en bonne santé. Les argumentations n’y peuvent rien et nous demandons donc de pouvoir au moins le garder en peau à peau quelques temps et que nous appellerons les infirmières lorsque nous serons prêt à le déposer. Il est alors près de 1h du matin, Dre Papillon sort encore à peine du traumatisme de son accouchement mais est prête à se battre pour garder Monsieur avec nous, non sans raison.

Nous nous relayons alors à prendre Monsieur dans nos bras. Il semble aux anges, nous aussi. Finalement vers 3h du matin, une de nos infirmières passe et nous fait comprendre qu’on pourrait garder notre petit cadeau avec nous puisqu’il va bien. Même conclusion que pour l’accouchement: quasiment tout semble négociable, il faut juste prendre les devants.

Lendemain matin, c’est l’épisode “le cirque”. Alors que Dre Papillon fait connaissance pour de vrai avec Monsieur en essayant de lui donner le sein, une foule impensable pénètre à tour de rôle ou simultanément dans la chambre: infirmière et son auxiliaire de nuit, puis de jour, conseillère en allaitement avec son infirmière en orientation, infirmier du centre de prélèvement qui vient faire hurler le petit alors qu’on essaie de le mettre au sein, infirmière de l’étage qui vient faire un autre prélèvement sanguin, préposé à l’entretien, préposé au service des repas et possiblement encore d’autres. Quand le nouveau-né prend le sein tout seul comme un grand, c’est cool. Quand il comprend un peu moins que ce qu’on veut (c’est souvent le cas d’un prématuré comme Monsieur), c’est nettement plus difficile et stressant.

Ensuite commence la routine du désagrément: comme Monsieur est prématuré, il faut s’assurer qu’il ne fait pas d’hypoglycémie. Le protocole pour cela ? Lui piquer le talon toutes les trois heures pour une glycémie. Sauf que Monsieur ne doit pas avoir manger dans les trois heures qui précèdent. Donc on fait le prélèvement qui fait huuuuurler le bébé puis on essaie de le mettre au sein sous le regard directeur et sévère d’une infirmière qui corrige le moindre geste de travers. Forcément, ce qui doit arriver arrive: Monsieur n’est pas intéressé à manger après une prise de sang, donc met à coté la moitié du précieux colostrum et fait une hypoglycémie. Qui dit hypoglycémie dit complément de lait maternisé (on voulait l’éviter) et prolongement du protocole pour 12 heures de plus. Bref, le protocole provoque ce qu’il cherche à démontrer en frustrant le nouveau-né et en fixant les intervalles de prise de mesure (Oui, on sait parfaitement que pour avoir des données convaincantes il faut un protocole un peu rigide mais là c’est ridicule. À moins d’avoir un bébé robot qui boit exactement à toutes les 3 heures sans se laisser déranger par les prises de sang…)

Après deux jours et demis de cette routine, incluant l’infirmière de garde qui veut voir une mise au sein fructueuse en pleine nuit, vient le congé. Sauf que…

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Arthur - 2 days and a half

Monsieur, le jour de son congé… avec une vague teinte jaune

Sauf qu’il reste encore à venir (au 3ème et 4ème jour): le pic de jaunisse du nouveau-né, la montée de lait de la maman quand elle allaite et le point maximum de perte de poids du bébé. Plusieurs choses peuvent ne pas aller là-dedans. Dans notre cas, la montée de lait a rendu la mise au sein difficile et même impossible et rapidement Monsieur a atteint un niveau de jauneur inacceptable.

Ceci s’est soldé par une réhospitalisation 24 heures après le congé pour faire baisser le taux de bilirubine, ce déchet d’hémoglobine qui rend la peau jaune et l’enfant somnolent sans être vraiment dangereux par ailleurs à ce niveau-là.

Sauf que là, les conditions ne sont pas les mêmes : seul bébé est hospitalisé, nous n’avons plus de chambre en cohabitation. Heureusement l’hôpital est bien organisé et propose une chambre pour les parents, mais dans une autre aile, à un autre étage. Moralité Monsieur passe son temps sous une lampe UV (c’est le traitement de la jaunisse). Dès qu’il montre des signes de faim (ou plus simplement toutes les 3 heures, en bon bébé-robot), nous nous faisons appeler dans la chambre pour accourir à la pouponnière pour essayer de le nourrir (dans la pouponnière, au milieu des infirmières parfois plus ou moins au pause, des moniteurs et des autres bébés qui hurlent). Inutile d’espérer une mise au sein réussie… il faut donc opter pour donner le lait à la tasse, désagrément suprême(Ceci implique aussi que la Maman tire son lait, expérience ô combien agréable et gratifiante et qui présente l’avantage certain de réduire encore plus la durée des nuits).

Au bout de 24 heures, Monsieur a déjaunit mais ne prend plus du tout le sein et a aggravé son comportement de petit sauvageon en pleine crise histrionique quand on lui présente une glande mammaire gorgée de lait.

Quelle est la moralité de tout ceci ? Possiblement qu’en maintenant une hospitalisation initiale plus longue (pour un prématuré, avec un poids et un taux de bilirubine vraiment limite), nous aurions évité du stress et cela aurait pu permettre de maintenir l’allaitement. Par ailleurs, malgré le souhait d’être “Ami des bébés”, l’organisation est trop fordienne pour permettre de vivre pleinement cette rencontre avec un nouveau membre de la famille.

Plusieurs des personnes que nous avons rencontrées là étaient charmantes et faisaient bien leur travail, mais le cadre et l’organisation rendaient cela vraiment difficile. Après nous sommes peut-être une bande de chieurs et que la majorité s’en satisfait très bien.

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