Qui est Dre Papillon ?

par Dre Papillon

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Adresse courriel : ebb [at] mon-ile.net (changez le [at] par @)

Bon, alors il paraît qu’il faudrait que je me présente ici et maintenant. Auparavant, sur Le Voltigeur et l’Impératrice, j’avais fait le choix de laisser ma présentation en suspens. Il me semble qu’un carnet, c’est déjà une longue présentation quotidienne en soi. Ce qu’on aime, ce qu’on déteste, ce qu’on fait, ce qui nous irrite, ce qui nous arrive, nos rêves… Tout y est, même un petit retour sur le passé. Et puis, je suis bien incapable de me présenter. Mais je vais tout de même essayer un peu.

Je suis Ebb, comme dans Ebb Tide. J’aime la mer, mais je n’ai jamais tellement baigné dans la culture maritime, à part à Cape Cod et avec Hoëdic. Je suis Québécoise, j’ai vécu en Abitibi une moitié de vie et en banlieue montréalaise l’autre moitié. Tout au plus un fleuve, mais pas d’océan par là…

J’ai découvert l’Internet, avec récalcitrance, à l’âge de 14 ans. Cela m’a permis de développer un intérêt illimité pour la France, et de me lier à de nombreux amis “virtuels” (dont Hoëdic). D’où un voyage dans ce pays, seule avec mon sac à dos, un été, à 16 ans. Et la naissance d’un amour immense avec Hoëdic, qui dure encore aujourd’hui. C’était une folie de voyage, imprévue, incontrôlable. J’ai sombré dans un gouffre de tristesse à mon retour, sur fond de musique de Mano Solo. Mais l’amour ne se contrôle pas. Alors nous nous sommes aimés à distance, pendant un an, et c’était dur. Et puis, toujours follement, j’ai décidé de ne pas faire mon cégep à Brébeuf ; plutôt aller étudier dans la ville d’Hoëdic à ce moment-là, Nantes. Pour ce faire, je me suis au passage bien débattue avec le Consulat français pour obtenir un visa de “mineur scolarisé” nécessitant un parrainnage adéquat. (Ayant toujours voulu étudier en médecine, je me doutais qu’un choix aussi risqué et un parcours aussi chaotique m’empêcheraient d’être admise dans ce programme contingenté au Québec. Qu’à cela ne tienne, j’aurais les reins assez solides pour m’attaquer au fameux concours P1 français.)

Je suis arrivée en 1ère à Clemenceau. J’étais plus vieille que la classe (ce que j’ai mal vécu), par le fait que je venais du Québec (notre cursus pré-universitaire dure un an de plus que celui de la France). En plus, dans ce bon lycée scientifique, presque tout le monde avait un ou deux ans d’avance (pratique inusitée ici). Mon année à Nantes n’est pas toujours facile, il pleut beaucoup, j’ai très froid (cette humidité qui transperce les os, du matin au soir, dehors, dedans, partout). Je suis encore mineure, ma famille me manque et il faut m’habituer à vivre chez la maman d’Hoëdic. Les amitiés sont aussi difficiles à tisser ; les Nantais me semblent être des gens assez froids, fermés et difficiles à rejoindre. Je me fais opérer de la main droite en janvier - voilà une bien mauvaise idée pour une droitière.

Scolairement, ça ne va pas très bien non plus (faut voir que ce moment pour changer de système n’était pas très heureux). J’essaie d’apprendre l’espagnol à la vitesse grand V (ce que les autres font depuis la 4e), je m’ennuie mortellement en sciences physiques, car j’ai beaucoup d’avance (mais mes “techniques” nord-américaines ne sont pas appréciées et les notes ne suivent pas) ; c’est la catastrophe en maths. Cette matière me fait m’arracher beaucoup de cheveux : l’apprentissage qu’on en fait ici et là-bas n’a rien à voir. J’ai beaucoup de retard, je n’utilise pas les “bonnes” méthodes, etc. Pas de bol, je tombe sur la prof la plus nulle que je n’ai jamais eu de toute ma vie, toutes matières confondues ; avec elle, impossible de rattraper un quelconque retard (pas de structure, pas de méthode, pas d’exercices, rien). Heureusement, je m’initie à l’histoire et à la géographie européennes avec grand intérêt et curiosité ; je n’ai rien à envier aux Français en français et encore moins en anglais.

Je reviens chez moi à l’été pour le renouvellement de mon visa et pour occuper un petit emploi. Hoëdic vient de diplômer de son école d’ingénieurs et d’être embauché dans une boîte de consulting à Paris. On a bien galéré, mais on a fini par pouvoir louer une chambre de bonne de 25 m2 dans le 8e, place de la Madeleine. De mon côté, j’ai déniché un petit lycée dans le 11e, place de la République, qui voulait bien de moi. Alors l’année qui m’attendait allait être… décidément parisienne, et elle l’a été.

La vie à Paris se caractérise entre autres par un affreux manque de temps. Les horaires du lycée sont chargés (tous les jours de 8h30 à 17h-18h), avec un examen de 4h tous les mercredis après-midi (quelle coutume désagréable et nuisible à un apprentissage et un travail réguliers !). Hoëdic et moi devons apprendre à vivre seuls (courses, cuisine, ménage, lessives dans une laverie du 9e, permettant de nombreuses et longues balades à Montmartre), ce qui demande aussi du temps ; mais nous sommes heureux d’avoir enfin notre chez-nous. Les horaires de boulot dans les boîtes de consulting parisiennes sont, pour ceux qui ne le savent pas, plutôt lourds (Hoëdic jamais rentré avant 21h-22h). D’un point de vue personnel, je vais mieux, j’ai ramené du Québec ma chatte Safran, on a une connexion Internet ADSL (ce qui me permet de communiquer longuement avec ma maman sans devoir compter avec angoisse chaque minute de communications téléphoniques à payer), il pleut moins, je me sens plus libre (vive le métro !). Les Parisiens, contrairement à ce que laisse croire leur réputation, sont excessivement sympathiques et je me lie facilement d’amitié avec eux.

Côté scolaire, je suis finalement exemptée de l’espagnol au bac. N’ayant pas pu m’adapter en maths en 1ère, je suis toujours très en retard. La nouvelle prof est une maniaque comme je n’en ai jamais vu (z’avez pas ça vous, des profs de maths normaux ?) et me saque complètement. Elle donne en prime une “interro” tous les lundis matin (ahh ! la déprime mathématicienne des dimanches soirs…). J’angoisse concernant mon orientation. Ayant découvert Remède.org et sa vision réaliste des études de médecine en France (témoignages, description), je n’ai plus très envie de m’attaquer au concours P1. Je souhaite être admise au Québec, mais on me fait comprendre que c’est impossible, que je ne décrocherai jamais la mention “très bien”… Alors je travaille fort, et je ne profite sûrement pas suffisamment de la beauté de Paris et de ses mille attraits.

Tout compte fait, je suis admise en médecine au Québec, et mieux encore, à Montréal (Sherbrooke et Québec me tentaient moins). C’est ce qui explique notre présence ici. Voilà un an et demi que j’ai entamé ce programme et j’adore toujours autant ce que j’y apprends. Hoëdic pensait qu’une expérience au Québec serait également intéressante, enrichissante et favorable pour lui ; il s’est laissé tenter. Avoir su que ce serait aussi difficile (pour ne pas dire impossible), peut-être que les choses se seraient passées autrement. Pour le moment, je me demande donc si je ne dois pas regretter ce choix de pays que nous avons fait…

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