Ma nouvelle tutrice d’APP, pour le cours de psychiatrie, se trouve être psychiatre surspécialisée en dangerosité.
Elle bosse à l’Institut Pinel de Montréal. Il s’agit d’un hôpital psychiatrique réservé aux criminels, malfaiteurs et autres délinquants de toute la province, faisant le lien avec le système judiciaire.
Elle les aime dangereux…
Quant à moi, je ne sais pas encore si je vais aimer ce domaine très particulier de la médecine. C’est très catégoriel (des axes, des catégories, des critères…), en tout cas. J’ai seulement un problème de fait et je peux déjà détecter de nombreux troubles psychiatriques chez les personnes de mon entourage. (Bon, d’accord, j’ai peu de mérite, parce que je savais déjà qu’il y en a plein dans ma famille.)
Je pense qu’à la fin, je serai en mesure d’affirmer avec certitude que… nous sommes tous plus fous les uns que les autres !
Tiens, ça me rappelle mon expérience dans une école “spécial ramassis de tous délinquants de la région”…
J’ai fait ma 6e et dernière année du primaire dans un programme de “bain linguistique”, et l’école en question n’offrait que des programmes spéciaux. C’était à Charlemagne, la ville de Céline Dion.
L’autre programme spécial offert là-bas, outre le mien, était donc la… fameuse “7e année”. Non, en effet, vous avez raison, il n’y a pas de 7e année au primaire.
Mais ces “cas”-là sont tellement dérangés qu’on en a créé une juste pour eux, parce que ça ne se faisait pas de les faire redoubler encore la 6e année, ou pour d’autres raisons. Trop dangereux pour fréquenter encore l’école primaire, en gros…
La règle était : pas plus de 10 par classe, sinon ça devient risqué. Une école spéciale quoi, où ils se retrouvaient entre eux pour avoir un suivi spécialisé et se voir offrir un apprentissage adapté à leur rythme…
(Qui a eu l’idée sadique d’aller foutre le bain linguistique là ? C’est comme de lancer un agneau à un banc de piranhas affamés !)
Cette année-là a sûrement été la plus malheureuse de ma vie. C’était la terreur quotidienne entretenue par les 7e, dès le matin, dans le bus scolaire jaune. Comme dans Forrest Gump. J’étais la dernière à monter, à la fin du trajet, tous les matins, et il fallait bien que je m’asseois où je pouvais… On faisait en sorte que je sois obligée de me jeter dans la gueule du loup, tout au fond de l’engin.
Les toilettes aussi étaient un lieu traumatisant. Les filles de 7e année avaient pour passe-temps favori d’essayer de défoncer la porte pendant qu’on y était.
La discipline était très sévère pour tout le monde dans l’école. Je comprends, rétrospectivement, que c’était nécessaire pour tenter de structurer et de juguler un peu ces gredins, futurs bandits des grands chemins.
Du coup, on devait toujours s’asseoir à la même place pour manger, dans le gymnase, au sous-sol. Je me souviens que j’étais mal tombée en termes de voisins de table. C’était tellement facile, de tourmenter et de harceler une petite timide qui fait son acnée avant les autres… Et je n’étais pas armée pour me défendre dans un tel monde de brutes.
Sans compter qu’on nous laissait moisir et nous sublimer en statues de glace dehors pendant des heures, tous les midis, hiver compris.
Alors ce qui devait arriver arriva… Par un froid midi d’hiver, un 7e année a, en toute connaissance de cause, botté son ballon de football américain de toutes ses forces à un mètre de moi. Je l’ai reçu de plein fouet au visage. J’étais alors dans mon 2e traitement à l’accutane, donc je coagulais plutôt mal. Qu’est-ce que j’ai pu saigner…
Les enfants peuvent être très cruels.
Vous savez quoi ? Je ne serai jamais psychiatre.