Chaque semaine, je passe une journée à l’hôpital pour l’apprentissage déjà clinique de la médecine : questionner des patients, les examiner, rédiger une bonne histoire de cas. On sera vraiment fin prêts en arrivant à l’externat !
Ce cours se passe en groupe de 4 étudiants encadrés par un médecin-moniteur.
L’an dernier, à la session d’automne, mon moniteur était un jeune chirurgien général (il va d’ailleurs opérer ma maman cet automne). À l’hiver, j’ai eu deux jeunes chirurgiens cardiaques. Mon année clinique s’est extraordinairement bien passée. J’avais des moniteurs motivés, stimulants, compétents et très humains. De vrais modèles, et encourageants en plus. Vraiment de quoi faire taire à jamais tous les préjugés que l’on peut avoir sur les chirurgiens (réputés froids, distants, bourrus…).
Et bien cette session-ci, je suis tombée sur un jeune chirurgien colo-rectal. Je l’ai rencontré sans aucun a priori négatif, comme peuvent en témoigner mes bonnes expérences de l’année précédente. Mais là, sérieusement, c’est un stéréotype incarné, ce chir’ !
Il est affreusement distant et assez réactionnaire par rapport au comité de cours. Il trouve les aspects biopsychosociaux (sur lesquels ont insiste beaucoup dans ce cours, de façon à devenir des médecins “humains”, justement) complètement débiles, barbants et inutiles. Il a la même opinion des jeux de rôle ou de la méthode très précise de questionnaire qu’ils essaient de nous inculquer.
Il ne se souvient visiblement de pas grand-chose qui ne relève pas du dernier segment du système gastro-intestinal, et ne montre aucun intérêt à ce que ça lui revienne. Non seulement il n’est pas “bon” pour enseigner (ni comme rôle modèle, ni comme enseignant au niveau des connaissances), mais en plus il est nuisible. Il a déjà commencé à nous contrarier là où il faudrait encourager (“tu penses que tu vois l’onde de pression veineuse jugulaire ? tu as sûrement une hallucination visuelle…”).
Alors que nous avons de nombreux objectifs de l’ordre de l’examen physique à maîtriser et à pratiquer, il nous fait perdre énormément de temps à s’arrêter bêtement et inutilement sur d’autres aspects de l’examen physique. Et il néglige de nous montrer d’autres aspects plus particulièrement délicats, difficiles à maîtriser et importants !
Enfin, le summum du summum fut quand il nous a accompagnés pendant la visite dans la chambre d’un patient (ce que l’on fait en groupe de 2 étudiants). Les moniteurs que j’ai connus jusqu’ici étaient généralement effacés et se contentaient de nous observer, intervenant très peu et seulement pour poser une question importante manquante ou pour corriger un petit geste. Ils nous donnaient le feedback dans notre local, après coup.
Là, non, monsieur le chirurgien prenait le dessus sur ma collègue qui essayait de réaliser l’entrevue, et il faisait carrément de l’enseignement en prenant le patient comme cobaye, parlant en jargon médical, évoquant toutes les possibilités de complications graves et causes de décès dans son cas, etc. Super…!
Incroyablement indélicat pour le patient, franchement, je n’ai jamais vu ça et je n’ai jamais fait ça non plus ! Je plains vraiment le patient pour la situation qu’il a dû vivre.
Même s’il est tout à fait génial de ses mains (ce que je ne sais pas), je ne peux pas croire que ce soit là un bon médecin !
Et je vais passer une bien longue session, sans renforcement positif ni encouragement, pourtant généralement bienvenus !
Le pire, c’est que sa façon de faire est tellement grossièrement inadéquate que je ne vois pas comment je pourrais poliment le lui signifier.