Comment je suis devenue souverainiste

par Dre Papillon

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Je me souviens que, avant d’aller vivre en France, j’étais comme beaucoup de Québécois. Je trouvais que le débat sur la souveraineté était galvaudé, sorti tout droit du passé, et qu’il fallait passer à autre chose.

Je trouvais aussi que les Québécois réfléchissaient trop en termes de oui/non et pas assez en terme de gauche/droite (expression qui les énerve souvent, qu’ils ne comprennent pas toujours et ne veulent pas trop utiliser). J’exagère à peine, et en fait, ça, je le pense toujours. Beaucoup ne se rendent même pas compte que certains de nos partis sont plus à gauche et d’autres plus à droite. De même, ils ne savent pas trop que leurs convictions sont plutôt à gauche, ou plutôt à droite, selon le cas. Grossièrement, on peut dire que le Québec est plus à gauche que le reste du Canada ou les USA. Mais ne sachant pas cela, les Québécois vont souvent voter pour certains partis de droite, parce qu’ils sont nouveaux ou qu’ils promettent du “changement”, sans se rendre compte de l’incompatibilité fondamentale entre leurs valeurs et celles de ce parti qu’ils élisent.

Bref. Je suis donc partie en France sur ce point de vue. Là-bas, j’ai bien sûr découvert à outrance les notions de gauche, de droite, les extrêmes et même la corruption. Les polarisations ne sont pas inutiles et sont mêmes primordiales à saisir, pour ne pas voter n’importe comment.

Mais ce qui m’a surtout frappée, au lycée, dans les cours d’éducation à la citoyenneté (ou était-ce celui d’histoire-géo ?), c’était l’histoire des décolonisations. Et je vous jure que la France s’y connaît en la matière.

Bref, on m’a beaucoup entretenue de principes tout cons et tellement évidents, comme le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et l’autodétermination des peuples, auxquels le mouvement de décolonisation dont fait partie la première tentative québécoise, était une réponse logique. Un peuple étant défini par sa langue, sa culture… C’est là que je suis vraiment devenue souverainiste.

Quand je suis revenue ici, je n’en suis pas revenue de constater que pour un taux d’imposition comparable à celui de la France, on a beaucoup moins de services publics, ou des services de moindre qualité. On peut penser, parmi les explications plausibles, qu’il y a de sérieux désavantages à dédoubler les paiments de taxes et impôts sur deux paliers de gouvernement. Ce n’est certainement pas optimal.

Finalement, on se trouve ici dans un contexte où le gouvernement fédéral fait tout pour nous retenir, plus ou moins contre notre gré, par exemple en faisant plein de publicité pour nous convaincre d’aimer ce pays. Personnellement, quand j’élis un gouvernement, c’est pour qu’il me représente, pas pour qu’il me fasse de la pub et oriente mon opinion dans son intérêt ! Et certainement pas pour qu’il le fasse avec l’argent des contribuables, ou mieux, avec de l’argent corrompu. L’acte de citoyenneté n’est pas équivalent à n’importe quel vulgaire acte de consommation.

Bref, j’espère que les récents événements vont finir de dégoûter les Québécois de l’attitude du Canada envers eux, et les Canadiens anglais de l’attitude de leur pays par rapport à notre province. D’ailleurs, il semble que ce soit déjà le cas et que certains chroniqueurs réputés, dans le rest of Canada (ROC), en viennent maintenant à cette conclusion : que la souveraineté du Québec serait non seulement inéluctable, mais aussi tout bonnement souhaitable.

Et ça, je crois que c’est résolument nouveau, comme idée qui fait son chemin.

Évidemment, on pourrait croire que les “conditions idéales” sont réunies en ce moment. On peut se surprendre de voir qu’il n’y a pas de réplique forte, pas de projet de société réellement porteur, pas de personnalité charismatique, dans le parti qui devrait être le plus concerné actuellement par cette situation… Un tel manque d’opportunisme, en politique ! Mais ça, c’est une autre histoire.

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