Le coeur serré de partir

par Dre Papillon

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Que tout ceci est passé vite ! C’est déjà le temps de rentrer à la maison, en passant certes quelques jours à Paris, mais tout de même… J’ai le coeur gros à l’idée de partir, des vacances qui sont finies. En même temps je meurs d’impatience de retrouver ma bulle de bonheur, avec mon amoureux.

Mais quelle expérience je viens de vivre… Ma relation d’amour-haine, de feu et d’eau avec ce pays aura certainement été très marquante et m’aura sûrement modelée de diverses façons. Expérience de tolérance, de zénitude, de contrôle de soi, de patience, d’adaptation et de souplesse (sur ce point je suis finalement moins pire que je pensais !), de lâcher prise aussi. Mon échelle de valeurs aura finalement été assez élastique, et ce qui me semblait insoutenable au début me semble maintenant normal.

Sénégal, tu auras recouvert tes terres d’un douillet manteau de verdure entre mon arrivée et mon départ. Tes baobabs, tes oiseaux, tes fruits vont me manquer. Ton soleil, ta chaleur, ta mer aussi. Et ton temps qui s’égrène doucement à un rythme humain.

Certes, tes petits talibés, ces enfants mendiants, m’auront irritée en plein jour et attristée en même temps. L’injustice d’une vie gâchée avant même de commencer, même pas 6-7 ans. Tes t-shirts à l’effigie de Ben Laden, arborés en pleine rue, m’auront mise hors de moi. La cuirasse de clichés de ta population m’aura souvent fait rager. Ton inertie et l’impossibilité d’appliquer ici des modèles qui marchent là-bas m’auront souvent déçue.

Mais j’ai la sensation d’avoir vécu tout cela avec une compréhension profonde des raisons culturelles qui se cachaient derrière. Ce ne fut pas toujours facile pour autant, mais je n’ai rien subi dans le noir. Ma formation m’aura armée suffisamment pour faire face à toutes ces situations sans y laisser ma peau, sans me laisser gagner par le découragement.

Je suis heureuse d’avoir réussi à percer certaines carapaces de stéréotypes pour attendre des coeurs en or et immenses. Le courage et la force de tes handicapés, qui luttent pour vivre ici dans un monde pour lequel ils sont si mésadaptés, m’aura inspirée.

L’expérience aura été concluante. Je n’oublierai jamais ce que j’ai vécu ici. Peut-être un jour je repartirai pour aider, ici ou ailleurs. Comme médecin, je serai toujours un peu utile, pour un individu à la fois. On ne peut pas changer le monde, mais on peut essayer de l’améliorer un peu, un tout petit peu. Mais il faut pour cela commencer par l’apprivoiser.

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