Après Damasio et sa quête de Spinoza, au tour d’Éric-Émmanuel Schmitt de m’occuper avec ses écrits, avec Diderot ou la philosophie de la séduction. L’auteur est réputé pour la qualité de sa prose, mais c’est surtout son sujet, Diderot, qui m’a particulièrement intéressé, philisophe des Lumières énigmatique, moins connu que ses contemporains Voltaire et Rousseau, et qui m’a toujours fasciné avec son Jacques ou sa Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient. Diderot fut également l’éditeur en chef et principal contributeur de l’Encyclopédie (dont le titre complet est Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers), une oeuvre de 18000 pages et 75000 entrées.
Se voulant un bilan éclairé de la connaissance de l’époque, l’Encyclopédie eu un impact énorme, malgré ses quelques milliers de copies, étant souvent considérée comme un des points de départ de la révolution française. La remise en cause de la préséance de l’église et de Dieu au profit de la raison humaine et des sciences étant un aspect central de cette oeuvre.
Difficile de ne pas faire un parallèle entre l’Encyclopédie des Lumières et Wikipedia.
Aujourd’hui, il n’est plus réellement possible, avec quelques dizaines de personnes, de rassembler tout le savoir humain. Plus de Descartes capable d’établir les règles de l’optique, d’étudier le fonctionnement du coeur et d’être l’un des plus grand philosophe de son temps.
Pourtant wikipedia, grâce à la technologie, arrive à rassembler le savoir des hommes hors du carcan classique du savoir. D’ailleurs tout comme l’Encyclopédie des Lumières, Wikipedia bouscule la logique dirigeante, celle de l’économie du savoir qui veut mettre un prix sur tout. L’encyclopédie en ligne montre également la force du partage par rapport à la compétition qui demeure la logique dominante moderne.
Sans pousser la comparaison trop loin, il est évident que Wikipedia reprend la vision de Diderot et autres encyclopédistes. Reste à voir l’impact que cela pourra avoir dans l’avenir.
Hier je discutais avec Karl et lui présentais cette comparaison. Il m’a alors fait part de sa crainte d’une perte de diversité avec cette encyclopédie. Je ne suis pas certain du fond de sa pensée mais c’est effectivement une crainte de par la forte représentation de certaines populations, comme le geekus americainus vulgaris (C’est d’ailleurs un problème plus large selon moi puisque les spécialistes en technologie construisent purement et simplement le monde moderne). Ces considérations amènent à dire qu’autant de personnes que possible, de tous horizons, doivent participer au développement de l’encyclopédie wiki.
Cependant Wikipédia me semble en soit un initiative nettement plus vecteur de diversité que la diffusion classique du savoir qui ne maintient la diversité que par le cloisonnement. Par ailleurs dans du contenu comme Wikipedia chacun trouve ce qu’il veut. Comme l’explique Schmitt à propos de la vision de Diderot, le mot n’est qu’une représentation, une représentation qui plonge en fait dans un sens lié au vécu de chacun.
Ainsi la lecture d’un article ne fait qu’éveiller des idées, faire des connexions et la structure des hyperliens est parfaite pour faire émerger d’autres idées. D’ailleurs n’est-ce pas mon vécu qui m’amène à faire le lien entre cette vision de Diderot et la question de Karl pour en sortir une idée ? Bref, s’il y a manque de diversité au niveau de wikipedia, c’est le fait d’un appauvrissement général car wikipedia me semble un bon outil pour véhiculer la diversité.