Les déboires du Journal de l'Association Médicale Canadienne

par Dre Papillon

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Depuis le début de ma médecine, je suis membre de l’Association Médicale Canadienne. Pour les étudiants, ça coûte seulement 15 $ par an, avec accès à plein de ressources Internet (des tas de livres très chers numérisés), des rabais, etc. Et après, on est accroc pour quand le prix de la cotisation augmente ;)

En prime, je reçois aux deux semaines leur journal, le JAMC ou CMAJ. Bon, ce n’est pas le New England, le JAMA, le Lancet ni le British Medical Journal, mais je pense que c’est tout de même l’une des grandes références de la scène médicale. (D’ailleurs, je dois en avoir une pile à lire depuis le mois d’octobre, la honte…)

Malgré tout, les publications médicales demeurent un monde assez discret normalement. Il est assez étonnant de constater qu’ils font les manchettes depuis le mois de février.

Que se passe-t-il donc ?

Tout a commencé le 20 février dernier, lorsque deux membres de l’équipe éditoriale ont été remerciés de leurs services par la présidente de l’association. Mais ce n’est pas une bête histoire de renouvellement du leadership, tel qu’évoquée initialement. La question de fond serait celle de l’indépendance accordée à la ligne éditoriale.

En gros, un article devait être publié, faisant état du fait que les pharmaciens ne respectent pas bien, au Canada, la confidentialité des femmes, en notant dans leur dossier leur achat de la pilule du lendemain. Mais l’article a été tassé sous le tapis sur pression des pharmaciens, qui n’aiment pas trop ce genre de publicité… Le pire, c’est que ce n’est même pas une information si intéressante ou cruciale. Un peu comme les caricatures danoises, finalement.

Par la suite, début mars, deux autres éditorialistes ont démissionné, toujours à cause du manque d’indépendance éditoriale qui règne au sein de la grande publication (qui a refusé de prendre position fermement à ce sujet). Des histoires plus délicates d’un point de vue politique auraient également été écartées ou modifiées.

Au début de cette semaine, le rédacteur en chef du journal a démissionné. Aujourd’hui, ce sont 14 des 19 derniers membres, soit la majeure partie du comité de rédaction, qui claquent la porte.

C’est à se demander s’il n’aurait pas mieux valu changer de présidente et/ou d’éditeur-censureur ! ;)

Que va devenir le journal ? Sa disparition serait une bien grande perte pour la diversité de nos médias spécialisés en général et pour la diffusion des études canadiennes en particulier. En même temps, son autonomie rédactionnelle demeure bien évidemment non négociable. L’affaire est rendue tellement loin que je vois mal comment on pourrait faire marche arrière.

Chose certaine, je regarde ma pile de revues non lue avec un oeil plus suspicieux…

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