Cultures du monde

par Dre Papillon

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J’aime encore et toujours beaucoup mon stage de pédiatrie, en fait de plus en plus à force de devenir meilleure et plus à l’aise. (Mais je demeure sensible à l’ambiance déplaisante de l’hôpital et aux expériences humaines professionnelles décevantes que j’y vis au jour le jour…)

C’est aussi un domaine où j’ai envie de lire spontanément plein de choses, même sur mon temps libre… Quand Hoedic me suggère, pour m’aider à savoir ce que je veux vraiment faire, de me demander “ce que j’aimerais enseigner à d’autres plus tard”, j’ai envie de répondre spontanément “la pédiatrie”. Vous voyez le principe.

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Grande Bibliothèque - Great Librairy

D’ailleurs, il se trouve que je suis enfin allée m’abonner à la Grande Bibliothèque qui se trouve à trois pas de chez nous ! C’est un peu honteux d’avoir attendu aussi longuement pour y mettre les pieds. Mais il y a un an, quand elle venait d’ouvrir, je craignais qu’il y ait trop de monde, et puis ensuite je suis partie tout l’été. Et à mon retour, je me suis mise à travailler très fort et à lire assez peu, et le temps a passé…

Je dois avouer avoir été bien déçue par certains aspects. Déjà, la bibliothèque est un peu surpeuplée, bruyante, etc. J’avais l’habitude d’un endroit intime et apaisant, avant, quand j’allais dans une bibliothèque. Maintenant, je dois faire la queue dans les escaliers pour me déplacer et me contorsionner dans les allées bondées.

Ensuite, comme elle est très populaire, il y a plein de livres déjà empruntés, en retard ou perdus. Mais le pire, c’est de dénicher les livres que le système indique pourtant comme présents ! Effectivement, les livres que je cherchais étaient pour la plupart un peu récents, et je m’étonnais qu’il en reste des exemplaires disponibles. J’ai fini par comprendre… Ce qui restait de disponible était en fait introuvable ! Soit pas encore replacé dans les rayons après leur retour, soit déjà dans les mains du suivant qui se promène sur place. Soit égaré dans la grandeur des lieux, soit simplement replacé n’importe où par des utilisateurs peu scrupuleux… Environ les 10 premiers titres que je cherchais et qui étaient sensés être disponibles ne l’étaient pas ! Je me suis même demandée si j’avais perdu la capacité de chercher une référence dans une bibliothèque…

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Grande Bibliothèque - Great Librairy

Qu’à cela ne tienne, j’avais aussi envie de lire des vieux bouquins pas populaires du tout. Ceux-là, ils étaient tous là et je les ai trouvés facilement.

C’est ainsi que j’ai emprunté des livres datant des années 1980 sur la médecine humanitaire. C’est intéressant, d’abord parce qu’à l’époque (c’était avant Internet !), c’est tout ce à quoi avaient accès les gens qui voulaient faire un projet humanitaire. Ensuite parce que ce domaine a beaucoup évolué pour ne pas dire explosé entre temps… Petit historique rétrospectif très intéressant de la Croix-Rouge, de Médecins sans frontières ou de Médecins du Monde…

J’ai aussi emprunté des livres sur la réalité des Antilles, de même que des romans antillais, ceux-là même que m’avait suggéré Akynou à notre retour de Guadeloupe. Il y avait entre autres les Lettres créoles : tracées antillaises et continentales de la littérature, 1635-1975, de Chamoiseau et Confiant, relatant l’histoire de la littérature antillaise depuis l’esclavagisme. J’ai aussi emprunté quelques romans de ces deux-là et de Maryse Condé. (Car avec le déluge actuel, je passe plein de temps dans le métro au lieu de sur mon vélo, et je lis, je lis…)

Il faut dire qu’en pédiatrie plus encore qu’en médecine adulte, il faut être très au fait des autres cultures. Et moi, ça m’intéresse beaucoup et j’y suis très sensible. C’est le domaine où l’on s’intéresse le plus au mode de vie : l’alimentation, le sommeil, les jeux, les loisirs, les soins… Tout cela est souvent très culturel et relié aux croyances d’origine. À Sainte-Juju en particulier, qui est situé dans le quartier immigrant de Côte-des-Neiges, nous avons une importante clientère indienne, asiatique et, comme partout à Montréal, haïtienne. Ça me donne envie de retourner dans les Antilles, de découvrir l’Inde et la Chine, l’Afrique centrale et de l’Est. Aurai-je assez de toute une vie ? ;)

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Grande Bibliothèque - Great Librairy

Il y a donc aussi parfois des patients africains. Cette semaine, j’ai eu un bébé sénégalais, et j’étais très heureuse de pouvoir saluer les parents dans leur langue, et parler un peu de leur pays, et me douter de comment ils élèvent leur enfant.

On entend beaucoup parler du Sénégal en ce moment dans les médias, que ce soit par la façon cavalière dont Abdou Diouf, secrétaire général de la Francophonie et ancien président du pays, a été accueilli au Canada dernièrement. Ou via les analyses du Monde accompagnant le passage d’Abdoulaye Wade, l’actuel président du pays, au siège de l’UNESCO (à l’occasion de la semaine culturelle “Le Sénégal au coeur de Paris” qui s’achève aujourd’hui). Tel que j’en avais eu l’intime conviction en oeuvrant sur place, le Sénégal est un pays un peu trompeur et les données statistiques réjouissantes à son sujet (développement économique, stabilité politique, liberté de presse… qui en font souvent le “plus meilleur pays d’Afrique”) sont à la fois propices à la manipulation et ne servent qu’à masquer un état de pauvreté de la population persistant et qui n’a rien de réjouissant. Comme quoi les données statistiques sont une chose, mais la réalité est ailleurs. Le pays finit toujours bon 157e sur 177 au classement du développement humain de l’ONU (PNUD), qui se base sur des critères comme l’accès à l’école ou la mortalité maternelle et infantile.

(Ce qui est moins réjouissant c’est d’entendre comme Sarkozy, ministre français de l’Intérieur, est allé “narguer” les Africains chez eux, au Mali et au Bénin, avec sa nouvelle loi sur “l’immigration choisie”… Qu’est-il donc allé faire là-bas ?)

Pour revenir sur les Antilles, évidemment, notre voyage de janvier était bien trop personnel (et trop court) pour que nous y apprenions grand-chose réellement sur la culture locale. Il faudra y retourner ! En attendant, c’est beaucoup plus instructif de lire les nombreux récits d’Akynou, les préparatifs du carnaval, les traits de sa belle-famille, etc.

Quant à moi, la prochaine fois que je vais à la Grande Bibliothèque, je vais au préalable effectuer des réservations et mises de côté. Et je vais aussi en profiter pour emprunter quelques opus de Françoise Dolto, mais aussi de Marcel Rufo et Boris Cyrulnik… (Oui, j’ai toujours été un peu boulimique de livres, dans une bibliothèque…)

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Parlant de cultures, j’ai aussi lu dernièrement le fameux livre de Nicolas Dickner, Nikolski, qui reçoit tant de prix (et les mérite bien). J’ai été complètement engouée et sous le charme. Il s’agit justement d’un livre rempli de cultures, amérindienne, nord-québécoise mais aussi sud-américaine. Un livre plein de territoires, de personnalités, de destins qui se croisent. De quoi faire virevolter votre imaginaire comme un papillon au-dessus de ce grand terrain de jeu qu’est notre planète. Quelque chose de résolument différent et bien écrit.

(Et qui donne envie de se remettre à l’espagnol et, bien sûr, de voyager vers le sud…)

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