Voilà, le moment fatidique de l’assemblée générale extraordinaire de l’association étudiante est passé.
On y a d’abord rencontré le doyen. D’habitude, c’est le vice-doyen qui s’occupe de nous, c’était la première fois que je voyais son supérieur direct. C’est dire si l’heure est grave !
On y a appris que la Faculté songe à nous retirer de tous des milieux de stage lundi le 27 novembre, si le conflit avec les médecins spécialistes n’est toujours pas réglé. En effet, elle estime ne pas pouvoir continuer à assurer notre formation dans ces conditions. Elle estime aussi que c’est une façon de nous rendre “solidaires” les uns des autres, et de jouer le tout pour le tout pour faire pression et que le conflit se règle. Par la suite, nous avons eu des échos selon lesquels si, le 15 décembre prochain, le conflit n’est toujours pas réglé et que nous sommes toujours hors stages, eh bien notre année serait foutue à l’eau et bonne à reprendre l’an prochain.
Pour l’externe 2 que je suis, cela signifie de ne pas pouvoir commencer la résidence (avec salaire…) le premier juillet prochain. C’est un très gros sacrifice dans ma vie, en fait, c’est intolérable. J’ose espérer que ce ne sont “que” des messages subliminaux au gouvernement pour qu’il règle la situation…
Pour mon stage actuel, même en manquant la dernière semaine, il devrait être possible de le valider en soumettant tous les travaux et en passant l’examen. J’espère qu’ils nous laisseront le passer, je n’ai pas envie de tout recommencer en mai prochain !
Apparemment, aujourd’hui le 22 novembre était un grand jour de négociation entre la FMSQ et le gouvernement. Je n’ai vu aucune nouvelle à la télé à ce sujet, ce qui signifie qu’ils ne se sont sûrement entendus sur aucune solution. Donc ça augure mal pour lundi prochain : nous serons probablement en “lockout”. À moins d’un blitz de négociations efficace… C’est spécial comme position, pour un étudiant, de ne pas pouvoir aller étudier même si son stage n’est pas touché. Je continue à m’y opposer et je trouve très dommage de risquer de sacrifier une classe d’externes 2. (Au passage, nous sommes aussi la plus grande faculté de médecine au Canada, donc il va manquer plusieurs médecins sur le marché dans quelques années…)
Bref.
Ensuite, c’est le pitbull en personne, le Dr. Barrette, nouveau président radical de la FMSQ, qui est venu nous parler avec un acolyte à l’air moins antipathique. Il a usé de toutes les plus belles méthodes de rhétorique pour nous mettre dans sa poche et nous expliquer pourquoi ils étaient obligés de faire ce qu’ils font. Comprenez, c’est triste, il faut vraiment que les médecins gagnent plus d’argent, et au-delà, qu’ils aient plus de pouvoir ! Les lois spéciales doivent cesser…
Le pire, c’est que le public embarquait ! Riait aux petites blagues, applaudissait. J’étais furieuse.
Après le brainwashing, nous sommes passés à l’assemblée. Nombre de mes collègues étaient POUR les médecins spécialistes. Allez-y flagellez-nous, encore un peu plus SVP ! Qu’est-ce que c’est qu’une année dans notre vie ? L’enjeu est tellement important, notre sacrifice actuel n’est rien ! Et ainsi de suite. Atmosphère électrique.
Il fut donc voté une position en faveur des revendications de la FMSQ, bien qu’opposée à leurs moyens de pression et pour un retour à l’enseignement… Au terme d’une assemblée très anti-démocratique où le vote arrivait bien avant que les gens au micro aient eu le temps de s’exprimer. Il faut dire que l’impatience régnait : nous étions 800 dans une salle pouvant en contenir 250 (assis cordés sur les tables plutôt que sur les chaises) et que cela faisait déjà plusieurs heures que nous étions là.
Enfin fut votée une motion de soutien à la décision de la Faculté de nous retirer tous de stage lundi prochain.
Mon unique soulagement : une grève immédiate ne fut pas votée. De quoi essayer de valider mon stage actuel, minimalement.
Il paraît que les externes de l’Université Laval à Québec sont tous mis à la porte de leurs milieux déjà et que ça commence à McGill. McGill songerait d’ailleurs aussi à retirer ses externes lundi prochain, mais en épargnant les externes 2 de la mesure, histoire de ne pas les pénaliser. Des fois, j’aimerais mieux étudier à McGill…
Pourquoi suis-je en furie ? Parce que mes collègues ne réalisent pas la réalité de la société québécoise. En particulier une réalité très décevante : l’argent ne pousse pas dans les arbres ! Je ne vois tout bonnement pas comment le gouvernement pourrait offrir une augmentation salariale de 44% à tous ses médecins. Le conflit peut durer longtemps, parti comme il est…
Je trouve aussi que mes collègues se sont laissés brainwasher par la FMSQ et sa rhétorique manipulatrice. Il aurait sûrement fallu rester neutres sur le sujet, autant par souci de cohésion entre nous que pour se laisser le temps de réfléchir et de rencontrer aussi les représentants du gouvernement.
En attendant, je suis très inquiète pour la bonne marche de mon année scolaire. Le pire, c’est que mon stage suivant, la médecine familiale, aurait aussi tout le potentiel pour être complètement intact, les généralistes n’étant pas en moyens de pression ! Donc ce qui va me plomber, c’est ma Faculté elle-même… Bizarre de situation, c’est le moins qu’on puisse dire.