Dans son édition de fin de semaine, la Presse publie un article sur le possible changement de tarification de la Société de Transport de Montréal. La mise en place d’un système avec carte à puce permettrait, par exemple, de zoner le réseau de transport ou de faire payer les déplacements “à la station”, selon le concept d’utilisateur-payeur.
Pas question de monter aux barricades pour l’heure puisque ceci demeure hypothétique. Mais si c’était le cas, ce serait un bien mauvais message (et ce n’est pas parce que d’autres villes dans le monde le font que c’est une bonne idée.)
La première raison est que cela va inévitablement faire monter le prix des transports en commun pour ceux qui font des distances supérieures à la moyenne. C’est bien dommage car d’un point de vue transport et environnement, ce sont ces gens là qu’il faudrait inciter à prendre plus le bus et le métro. En augmentant leurs tarifs, la STM comble l’écart de prix entre transports en commun et voiture, un des rares incitatifs tangibles (le confort et la rapidité jouant assez rarement en faveur du bus mettons).
Par ailleurs, l’augmentation des prix des logements (locatifs notamment), pousse les populations les moins bien nanties à quitter les quartier centraux pour s’éloigner. Par conséquent, ils risquent d’être victime de cette hausse de coût alors qu’ils sont les utilisateurs les plus réguliers des transports en commun ; ce sont aussi eux qui en ont le plus besoin.
Je ne pense pas que les dirigeants de la STM soient des abrutis. Ils ont un trou béant dans la caisse et revêtent des concepts qui semblent sensés pour déguiser des augmentations de tarification. Mais ils ont confondu le pollueur-payeur, cher aux écolos, avec l’utilisateur-payeur qui ne s’applique pas dans ce cas. Dans le premier cas, pollueur-payeur, l’augmentation du dommage est linéaire (voire exponentielle avec les effets d’emballement) avec la pollution. Le but louable est donc de rester aux niveaux de pollution les plus faibles. Au contraire, le transport en commun est un outil qui gagne en puissance avec l’effet de réseau : plus le monde l’utilise, plus chacun est gagnant puisque les coûts d’exploitation baissent (sous certaines conditions). Le but est que le maximum de personnes l’utilisent. C’est pour cela que certaines villes (généralement des petites villes) ont même rendus les transports en commun gratuits
A contrario, la vision proposée dans l’article va tendre à faire baisser l’utilisation dans les zones périphériques. Poussé à son maximum, ce principe pourrait même dicter une baisse de la couverture du réseau arguant la non-rentabilité de certains segments. Contrairement à une politique de rationalisation du réseau que cela pourrait augurer, la STM devrait se lancer dans une politique de développement. Cependant ni la STM ni la Ville de Montréal n’en ont les moyens, la province de Québec guère plus et le Fédéral qui croule sous les surplus budgétaires ne lève pas le petit doigt(En fait c’est un peu faux car ils ont versés quelques millions). Situation bien compliquée pour faire ses comptes à la STM.
Note : Tant qu’à rénover les systèmes de billetterie, ce serait une bonne idée de mettre des guichets automatiques acceptant les cartes de débit/crédit dans les stations de métro plutôt que d’espérer voir les usagers payer 100$ de transport en liquide…
Note 2 : Si la politique se zonage vient à être mise de l’avant, c’est certain que l’exemple de Paris sera utilisé. Or il faut bien comprendre que le zonage s’applique principalement au train de banlieue et à tout ce qui sort de Paris (et même de la proche banlieue). À l’intérieur de Paris, dans la partie homogène du réseau de transport, c’est un taux fixe. Si la STM met en place un zonage dans la partie de la ville couverte par le métro par exemple, ça ne sera plus la même chose.