Le galvaudage du concept de sélection naturelle est chose courante, notamment dans son application sociale. Le lecteur me pardonnera donc le détournement auquel je vais moi-même m’adonner.
Le monde de l’entreprise n’est autre qu’une réplique du monde naturel. À ce jeu le pouvoir d’une personne répond à la domination d’une espèce sur son habitat naturel. Le processus de sélection naturelle est complexe, chaque espèce développant au fil des générations des stratégies diverses. Mais au sein de la Compagnie, entité écosystémique autonome, la variété semble moins de mise. La domination s’exprime rapidement et par une stratégie souvent répétée de la négation de l’Homme et de ses aspirations profondes.
Même dans un contexte qualifié d’équilibré, les quelques personnes de pouvoir écrasent invariablement les autres indépendamment de leur capacité à foutre le camp car on en retombe toujours sur les mêmes cas.
Car oui, la sélection naturelle en entreprise fait monter les surhommes, et pas ceux qu’avait Nietzsche en tête. Plutôt celui prêt à sacrifier tout à sa réussite personnelle et s’attendant des autres qu’ils fassent pareil, toujours au profit de celui en haut et non pour eux-mêmes et pour en retirer les fruits. Ainsi la sélection naturelle nous contraint-elle à souffrir invariablement, plus ou moins directement (plus directement que l’on détient soi-même un certain pouvoir) des êtres autoritaires, garants du bon fonctionnement de l’Univers et qui à ce titre refusent à toutes et à tous les droits les plus basiques dans un monde développé comme celui d’avoir l’esprit en paix.
Les hommes sont confiés par la nature les uns aux autres : un homme, du seul fait qu'il est homme, ne dois pas être regardé comme un étranger par un autre homme Cicéron, *Des fins des biens et des maux*