Périodiquement me revient en tête une lancinante question. Et si je me faisais médecin militaire ? Les avantages financiers en seraient bien réels et régleraient tous nos problèmes à ce sujet pour un bon moment. Et puis, ça a l’air intéressant, en termes d’opportunités de carrière. Au pire, si je n’aime pas ça, l’engagement n’est que pour 4 ans ! Mais évidemment, ils ne peuvent me garantir une embauche à Montréal, quand je finirai mes études. Ni que je n’irai pas passer 6 mois dans l’Afghanistan du moment (l’Iran ?), avec les risques potentiels que cela implique.

Mon plus gros problème est d’ordre idéologique. Car je suis farouchement anti-guerres. Peut-être pas anti-armée, car les casques bleus, c’est pas si mal que ça au fond. Mais les guerres, vraiment, me répugnent, de même que tout ce qui s’y rapporte, les fusils, la violence… Je ne voudrais pas me retrouver impliquée dans l’une de ces manifestations de la folie des hommes, ni de près ni de loin.

Tout comme ce serait une arnaque que je me marie à l’église, ce serait contre toutes mes convictions de faire partie d’une armée, aussi canadienne soit-elle.

Car malheureusement, j’ai une vision unificatrice et globale de notre petite planète bleue. J’accorde autant d’importance aux vies humaines dans les pays loin d’ici, issus d’autres cultures, qu’aux vies ici. Je m’attriste autant des disparus du tsunami que de ceux d’Irak, de Katrina ou de la famine au Niger. Une absence vraiment désolante de tout patriotisme.

Non décidément, je ne vais pas vendre mon âme au diable. La liberté, ça n’a pas de prix !

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Une vieille dame aujourd’hui, en consultation pour suspicion de néoplasie, me disait qu’elle ne voulait surtout pas d’un cancer. Sa vie vient seulement de commencer ! - me dit-elle en souriant, faisant référence à sa retraite tout récente, après une vie de dur labeur.

C’est quelque chose comme ça qui doit expliquer ma perpétuelle impatience ou avidité de vivre. Aucune garantie que rien ne m’empêchera de profiter, plus tard.

Hier je suis tombé sur un article du Guardian traitant de la mauvaise utilisation des sciences dans la presse, avec des résultats souvent vulgarisés à l’extrême et des chiffres manipulés sans réelle précaution.

Voici un exemple concernant l’accessibilité à l’éducation. Ce n’est pas des sciences pures, mais c’est un bel exercice de lecture. Lemonde.fr publie aujourd’hui un classement des contributions des étudiants à leurs études en pourcentage du PIB per capita. La France termine 11ème sur 16, derrière les USA et le Canada. Personnellement j’ai testé France et Canada dans des conditions similaires et je suis certain que j’ai moins dépensé en France qu’ici.

Si on va regarder l’étude à l’origine, que je vous conseille car très intéressante, on commence à mieux comprendre. Déjà le PIB/habitant est une mesure toute relative. Par exemple l’Irlande se retrouve avec le meilleur PIB/habitant d’Europe, presque au niveau des USA. Surement serait-il préférable d’utiliser les revenues moyens nets (mais aucun chiffre ne serait parfait déjà à ce niveau)

Ensuite, les auteurs étudient grosso modo les coûts (études, frais d’équipement, habitation, etc.) moins les aides (prêts et bourses) pour regarder l’accessibilité financière aux études supérieures. Selon l’étude, le Canada offre plus de bourses que la France… déjà j’ai des doutes mais bon, on en va pas remettre en cause leurs chiffres.

Surtout, l’étude oublie les aides à l’hébergement existantes en France (qui dans mon cas couvraient la moitié des frais) alors qu’il n’y a pas d’équivalent au Canada (le fait de quitter le foyer familial est pris en compte dans le calcul des bourses). Et ça fait une sacrée grosse différence !

Ensuite, l’étude considère les prêts gouvernementaux comme des aides. Le Canada tout comme les U.S.A offrent des gros prêts, (à 0% pendant les études, 6% pendant le remboursement au canada, 0% et 3.37% aux USA, source). Mais en France il existe de nombreuses sources de prêts, souvent à des taux intéressants… sauf que ce n’est pas gouvernemental et n’entre pas dans le calcul de l’étude (mais effectivement ou pourrait critiquer le système français de laisser aux institutions banquaires et aux organismes para-universitaires la charge de faire ce type de prêts). Au résultat deux éléments très importants sont négligés dans l’étude qui changeraient énormément le classement de la France. Pour le Canada, c’est plus réaliste puisque c’est une étude canadienne, donc les auteurs connaissaient surement mieux les critères à prendre en compte (c’est en soi un biais).

Je ne jette pas la pierre aux auteurs de l’étude : un comparatif entre pays est surement difficile à faire. Un tel document offre un vision intéressante permettant de comparer les systèmes à quelques bémols près. Par exemple, l’étude aurait également pu prendre en compte le revenu moyen des étudiants (ces derniers travaillant plus en Amérique du Nord qu’en France par exemple), ce qui aurait encore plus désavantagé la France. En revanche publier un classement comme le propose Le Monde me semble vraiment limite. Un tel tableau devrait être accompagné d’une analyse un peu plus approfondie (mais au moins ils donnent leurs sources ce que ne font pas tous les journaux).

Après mon départ du Sénégal, il s’est mis à pleuvoir, pleuvoir et pleuvoir encore. Pleuvoir comme il ne l’a pas fait depuis 20 ans au moins. Évidemment, avec les routes souvent non pavées et l’absence de système de drainage des eaux de pluie (même à Dakar), on imagine le résultat ! Déjà qu’un pays en développement présente des ressources assez peu fiables, c’est le bordel le plus complet maintenant !

Dire que la moindre goutte provoquait déjà des coupures d’électricité et d’eau potable parfois longues… Je suis contente de ne pas vivre ça en ce moment ! Pas sûre qu’il soit possible de mener à bien des activités normales quelconques dans un tel contexte.

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Dans Le Devoir, au mois d’août, une série sur les femmes africaines, Un continent sur les épaules (verrouillée malheureusement). Un peu d’espoir pour un continent malmené et délaissé, mais pas trop quand même. De façon très amusante, un des articles parlait de Guédiawaye, la banlieue de Dakar où je me suis impliquée. On y interviewait une dame que je connais, avec qui j’ai même fait des visites à domicile !

Bon, l’article loue le principe de “faux microcrédit” qui a lieu là-bas, un genre de loterie où tout le monde donne un certain montant et où on fait tirer la cagnotte à la fin. J’étais exaspérée par ce genre de manifestations, car malheureusement, elles étaient jumelées avec les séances de prévention et sensibilisation sur l’hypertension. Or, ces femmes de moins de 50 ans n’étaient pas forcément les meilleures cibles de prise de tension (plutôt les femmes ménopausées, et les hommes, qui étaient totalement absents des séances).

Qu’ai-je remarqué sur la condition de la femme au Sénégal ? Elle n’est vraiment pas si mal, sûrement bien meilleure qu’il y a quelques années. Les femmes peuvent souvent travailler à l’extérieur ou avoir des activités communautaires. Elles contribuent nettement au développement de leur pays. Elles ont de plus en plus accès à l’éducation. Mais… la polygamie persiste (et signe). La contraception est presque inexistante. Sans compter la mortalité infantile et maternelle qui demeure élevée faute d’un système de santé digne de ce nom. Et les hommes là-bas continuent de se croire supérieurs et plus intelligents que les femmes. Avec toutes les conséquences comportementales que l’on imagine en termes d’attitude hautaine et autoritaire.

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Pourquoi l’Afrique est-elle pauvre ? Réponse à la question qui tue, par Naomi Klein…

Ah oui et allez voir ce film aussi, La constance du jardinier, si vous ne savez pas quoi faire. Un bon suspense entre le Royaume-Uni et le Kenya, saupoudré d’une pincée d’histoire d’amour. Mais surtout, des réflexions toujours très actuelles sur le sida et les compagnies pharmaceutiques en Afrique… Ce n’est pas un documentaire, mais nul besoin de chercher très loin dans notre triste réalité

Marre de la pub ? Ben c’est pas fini !

Internet actu y va d’une entrevue avec le directeur de Tribeca, une agence de marketing alternatif dont on entend assez régulièrement parler ces temps-ci. On remarquera le ton ouvert de la discussion : l’invité ne se cache pas de son objectif et des méthodes utilisées et le résultat n’en est que plus intéressant.

Tel qu’expliqué le but de ce marketing alternatif est d’obtenir une relations de qualité avec des personnes ciblées. Fini le spot publicitaire ; ça se passe dans la rue et vise à entrer en contact avec des personnes souvent en suscitant leur intérêt. Ça passe aussi par le marketing viral qui présente souvent l’avantage de passer par et vers des personnes qui ont intérêt dans le sujet.

Autre point remarquable : ce type de démarche marketing arrête de prendre les gens pour des cons ! Le but n’est pas de répéter un message suffisamment de fois pour qu’il rentre, mais plutôt d’échanger. Et c’est pas rien.

Mais je peux difficilement en penser du bien. Certes l’objectif est de créer une relation ouverte et aussi saine que possible, mais ça demeure une relation de vente, entre un vendeur et un consommateur.

Les méthodes visant à utiliser des personnes comme vecteur de marketing est de plus en plus présente. Les fanatiques des marques ne tarderont pas à devenir des représentants de ces marques. C’est déjà un peu le cas pour Mac. C’est aussi le cas de ces personnes qui donnent les adresse e-mail de leurs contacts pour participer pour leur permettre de bénéficier d’offres exceptionnelles (en donnant en prime l’impression d’être à part).

Comme si les relations humaines n’étaient pas assez facile, les marchands du temple vont ainsi jouer un rôle ambivalent en utilisant les processus relationnels comme vecteur marketing.

Ça demeure assez supportable quand c’est à une échelle raisonnable, mais ne risque-t-on pas de voir une escalade comme ce fut le cas pour les autres canaux marketing ? La publicité a tué la télévision ; des procédés de marketing viral agressif transformant des personnes en représentants forcenés ne risquent-ils pas de poser des problèmes relationnels. Surement ma vision est-il exagérée mais je ne suis pas forcément très chaud pour ce type d’évolution même si les tendances de ces dernières années montrent que c’est assez inéluctable.

L’autre crainte est la difficulté croissante des organismes de la société civile de se faire entendre, les organismes sans but lucratif en premier lieu. En effet, les citoyens sont déjà très difficiles d’accès simplement parce que la notion de responsabilité citoyenne n’a pas vraiment la cote, et parce que les occupations sur nombreuses. Si la vie commerciale vient se mélanger aux relations humaines classiques et empruntent encore plus de temps il ne reste plus grand chose. Par ailleurs, il y a un réel risque de fermeture supplémentaire des gens pour se protéger de ces marketing à tous les étages. En effet, si certains s’amusent de cette tendance, ça ne me plait pas et comme d’autres, j’aurais plus tendance à me refermer qu’autre chose.

Bref, c’est à mes yeux une invasion supplémentaire des entreprises dans la sphère des relations humaines et je vois mal comment ça pourrait améliorer quoique ce soit.

Je me souviens d'une scène à l'UMD : le psychiatre était entré dans ma chambre avec six ou sept autres médecins. En me tournant le dos, il a demandé à voix haute ce que signifiait "pédé comme un phoque" . Après avoir donné l'explication, ils sont partis en riant. Source : Lemonde.fr, [Guillaume "n'arrivait pas à parler", alors, à 17 ans, il a craqué](http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-687414,0.html)

Ouaip, bien y a encore des progrès à faire… Je suppose que ce type d’article fait suite à une statistique montrant que les jeunes homosexuels sont 13 fois plus “à risque” de faire une tentative de suicide que les hétéros du même age…