C’est l’alpha et l’oméga de toute vertu. D’abord la mère et son enfant. D’abord la chaleur des corps et des coeurs. D’abord la faim et le lait. D’abord le désir, d’abord le plaisir. D’abord la caresse qui apaise ou console, d’abord le geste qui protège ou nourrit, d’abord la voix qui rassure, d’abord cette évidence : une mère qui allaite ; et puis cette surprise : un homme sans violence, qui veille sur un enfant qui dort.

André Comte-Sponville (Petit traité des grandes vertus)

Tel est le nom de mon cours du mercredi soir. Le titre complet pourrait être perception du risque en santé environnementale.

C’est un cours très intéressant, vraiment. C’est l’occasion de s’interroger sur les critères selon lesquels nous jugeons, nous percevons les événements qui nous entourent. Une réflexion de quelques instants, mais pourtant rarement effectuée par ailleurs, permet de comprendre à quel point il est impossible d’être objectif dans le traitement de l’information.

L’un des sujets de réflexion d’hier est un événement récent, trop récent pour qu’il n’en soit pas biaisé d’ailleurs, mais qui mérite réflexion tout de même.

Au lendemain de l’attentat sur le World Trade Center, de nombreuses questions se sont posées aux responsables environnementaux à savoir si l’importante fumée ainsi que toutes les particules volatilisées par l’impact ne présentaient pas un danger du point de vue sanitaire. La Maison Blanche a alors émis un communiqué de presse basé sur les dires de l’EPA stipulant que les niveaux de pollution et de particules dans l’air était inférieurs aux normes en vigueur. Soit.

Mais, pas plus tard qu’au début du mois, un groupe d’expert en charge de revenir sur cette question lance dans la mare un pavé de 500 pages. 500 pages d’accusation contre l’EPA et la Maison Blanche, le premier ayant remis un rapport alors que certaines concentrations (notamment BPC et amiante) n’étaient pas encore connues, la seconde pour avoir dit que certains niveaux étaient sous le seuil acceptable alors qu’ils étaient au-dessus des normes de la même EPA.

En réalité, que faire dans une telle condition ? Il est évident qu’il y a eu une manipulation grossière de l’information. Mais supposons que nous sommes en charge de prendre une décision à cet instant précis, un ou deux jours après le 11 septembre : tous les résultats ne sont pas sortis, certains milieux poussent pour avoir des réponses. Si on ne dit rien, on ouvre le champs aux pires rumeurs, si on dit toute la vérité c’est-à-dire qu’il va peut-être falloir évacuer la ville pendant plusieurs semaines, ce sera la panique (et ce n’est pas sans risque) et adieu la reconstruction rapide, si on cache la vérité, on prend le risque de voir la population contaminée.

Fortement contaminée ? Tout laissait à penser que la contamination n’était pas très importante, mais les séquelles peuvent tout de même se faire sentir au bout de quelques années.

Alors que faire ? Naivement, je serais partisan de la “vérité”, en l’occurrence faire part à cette population sous le choc des risques encourrus et déclarer un périmètre de sécurité. Cependant les réactions peuvent être complètement inconsidérées dans une telle situation. Bien que j’ai généralement la critique facile à l’égard de l’administration Bush, il est évident que la question soulevée ici est loin d’ête évidente.

Ce cas montre aussi travers notoire : les dirigeants qui ont pris cette décision ont eu raison ! En effet, qu’auraient-ils perdus s’ils avaient dit la vérité ? Beaucoup ! L’économie ne serait pas reparties avant plusieurs mois, une vraie catastrophe. Qu’ont-ils perdu (ou que vont-ils perdre) ? Sûrement assez peu, peut-être quelques points de sondage et quelques dollars en frais d’avocats ou d’expert. Je vous laisse tirer les conclusions sur ce qui guide les choix politiques !

Quoiqu’il en soit, le 11 septembre 2001 n’en finira pas de si tôt de remuer le monde ! Et c’est malheureusement ce que souhaitaient les auteurs.

J’ai souvent eu l’occasion de constater à quel point il est difficile de maintenir une situation, d’obtenir que quelque chose soit pérenne.

Très souvent, on se lance dans des entreprises qui semblent difficiles et pourtant on réussi ! Mais pour combien de temps ?

J’ai l’exemple devant moi de l’organisme pour lequel je travaille. Organisme lié à l’environnement qui essaie de promouvoir le développement durable et autre (je vous fais grâce de mon laïus sur le sujet). Lors de la création dudit organisme, tout s’est passé très vite, tous les partenaires et soutiens se sont impliqués rapidement et énergiquement ce qui a permis de monter une structure reconnue en quelques mois seulement.

Aujourd’hui, 2 ans après, on essaie de relancer des activités qui avaient connues un relatif succès et on arrive à peine toucher plus de monde alors que nous sommes supposés être rôdés et bien loin d’avoir épuisé la population cible.

On veut renouveler les partenariats mais d’un coup tout le monde est débordé. Ce qui devrait se faire en quelques jours prend des semaines. Comme je le sens, tout ceci va continuer de manière plus ou moins bancale jusqu’au jour où les subventions vont cesser.

C’est pourtant maintenant qu’il faudrait un réel soutient car c’est une fois qu’une certaine expérience se fait jour qu’il est possible d’être constructif ! Et c’est à ce moment que tout le monde se retire.

C’est le cas pour notre organisme, mais c’est un constat général : bien des gens sont prompts à participer au lancement d’un fantastique “truc” qui révolutionnera la Terre entière. Mais quand il s’agit de faire vivre le truc en question, c’est une autre affaire.

Bien dommage car bien des occasions doivent se perdre ainsi.

Si j’étais restée en France, c’est sur les bancs de la fac de médecine Broussais-Hôtel-Dieu (Paris VI, Pierre et Marie Curie), au 15 rue de l’École de Médecine, que j’aurais usé mes pantalons… En effet, c’est ainsi qu’en avait décidé l’impénétrable SADEP (Service inter-académique d’Affectation des Etudiants en Première année d’études médicales).

Quelle ne fut pas ma surprise d’apprendre récemment que cette faculté ferme ses portes aux étudiants et que j’aurais fait partie de leur toute historique dernière vague. Quel dommage, car il s’agissait sûrement là de la plus belle faculté de Paris, magnifiquement située dans le 6e arrondissement…

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Finalement, je serai plutôt venue hanter les sièges orange du mythique amphithéâtre P-310… C’est pas plus mal.

Mais revenons à la douceur. Ce qu’elle a de féminin, ou qui paraît tel, c’est un courage sans violence, une force sans dureté, un amour sans colère. C’est ce qu’on entend si bien chez Schubert, c’est ce qu’on lit si bien chez Etty Hillesum. La douceur est d’abord une paix, réelle ou souhaitée : c’est le contraire de la guerre, de la cruauté, de la brutalité, de l’agressivité, de la violence… Paix intérieure, et la seule qui soit une vertu. Souvent trouée d’angoisse et de souffrance, parfois illuminée de joie et de gratitude, mais toujours dépourvue de haine, de dureté, d’insensibilité…

André Comte-Sponville (Petit traité des grandes vertus)