Je reviens du Royaume de Fraaaance, un pays fidèle à lui-même, plongé dans sa crise perpétuelle qui n’en ai pas une. Un pays peuplé de sortilèges, de maléfices et de diables de toutes sortes comme je vais vous le conter ici-même.

Participant aux festivités célestes d’une union divine, j’ai passé quelques jours à Cannes, un village, comme tous les autres de la région, où des trolls à l’allure étrange vivent les uns sur les autres et en ressentent visiblement une grande fierté.

Ayant rendez-vous à Antibe-la-belle, je me dirige vers la gare de téléportation de Cannes. Suite à toutes sortes d’événements rocambolesques (comme prendre l’avion), je n’ai que 10 minutes pour prendre mon billet. 1 seul distributeur sur 4 fonctionne, les caisses sont prises d’assauts. Mes pouvoirs me permettant d’allonger le temps étant inefficaces dans cette dimension, il appert rapidement qu’il sera impossible de prendre le seul train sidéral me permettant d’être à l’heure. N’ayant que 3 arrêts à faire, je tente ma chance.

Mais la chance est une traitresse et après le premier arrêt une controleuse démoniaque, trident à la main et crachant du feu, surgit sans crier gare. Comptant sur mes talents de négociation, un brin de naïveté et un accent québécois un peu forcé, je reste en place choisissant ainsi de ne pas céder à la panique généralisée poussant tous les trolls du wagon à courir en tous sens comme des poules sans tête.

Hasard malenconteux, un jeune saltimbanque devant moi est dans la même situation et elle le verbalise tout en lui promettant l’enfer. Mes chances d’en réchapper vivant sont désormais très faibles et effectivement, elle hurle dans sa voix d’outre-tombe qu’il m’en coutera 35 écus d’euros (pour un billet qui ne devait surement pas couter le dixième de ça) ainsi qu’une lapidation en public par tout ce que le royaume compte d’esprits malins. Inutile de protester, j’ai un plan B.

Avec mon compagnon d’infortune, elle nous trâine en bout de rame pour acquitter notre du. Je viens d’arriver du Royaume de Montréal et j’argumente que j’ai seulement des pesetas canadiennes, ce qui n’est pas étonnant puisque j’ai sorti mon porte-feuille canadien. Me menaçant avec son trident maléfique, je lui explique que j’ai cependant une carte magique permettant de faire appaître la somme voulue si manipulée correctement. Cependant, j’avais pris soin de retirer la vraie cartie magique-visa du porte-feuille, de sorte qu’il ne reste plus qu’une vulgaire carte en plastique dont le sortilège payeur ne fonctionne qu’en Québécie du Nord, un royaume lointain. Dès lors, il lui est impossible d’obtenir le pécule souhaité ce qui n’est pas sans déclencher foudre et tonnerre tout autour de nous.

Je sens la délivrance arriver puisque je dois descendre à l’arrêt suivant. Toutefois c’est une diablesse acharnée visiblement décidée à me faire payer mon insolence de descendant direct du royaume de Montréal. Elle contacte par télépathie cellulaire un balrog pour qu’il me cueille à la descente et me déchiquette en lambeaux de chair. Effectivement, arrivé au quai, un Balrog de classe Sécurité m’attend de pied ferme avec son odeur de brulée caractéristique.

Cependant, mon intelligence supérieure me permet de rapidement profiter de l’idiotie de cette brute épaisse qui visiblement n’a pas vraiment compris ce qu’il devait faire de moi. Ce faisant, je lui explique que loin de m’amener en enfer (pour m’y broyer les os jusqu’à ce qu’en sortent les 35 écu d’or attendus), je dois simplement acheter un billet de TER car, québécois de mon état, je pensais avoir un titre de transport en règle, ce qui n’était pas le cas.

Le Balrog Sécurité, visiblement dans l’incompréhension totale face à des mots aussi bien articulés m’abandonne devant un guichet et s’en retourne pleurer dans son coin. De là, il suffit d’envouter le pauvre guichetier avec quelques potions conservées dans mon bissac dorsal pour ensuite tourner des talons et partir… sans payer un sou.

Tout cela pour que celui qui devait me prendre à Antibe-la-belle arrive avec 30 minutes de retard, ce qui m’aurait permis de prendre le train suivant et donc de payer mon billet. Ceci m’aura toutefois permis d’affronter le diable et ainsi le vaincre.

Note : durant ce séjour, j’ai eu le loisir de lire Don Quichotte ce qui n’a pas manqué de me faire découvrir que des aventures extraordinaires m’attendaient à chaque coin de rue et qu’en tant que redresseur de tort et défenseur des opprimés, je me devais d’affronter (et vaincre) les pires forces sataniques, ce que j’ai fait avec courage. Gare à vous, mécréants, mon bras ne faiblira pas !

  • Les plus perspicaces auront reconnus la référence au film La cité de la peur, qui se passe sur la croisette.

Les plus belles victoires ne sont pas toujours celles qui font le plus de bruit.

Depuis quelques semaines, mon petit frère a réussi sa rentrée au cégep. Après trois années d’abondon scolaire et de dur labeur en thérapies.

Je suis très fière de lui. L’oiseau s’est envolé du nid. Il ne sait pas encore trop où aller, mais il a le temps de voir venir l’horizon.

Le grand retour commence. De Maria à Montréal, il y a près de 900 km à parcourir vaillamment. Grands routiers devant l’éternel, nous avions décidé de couper le trajet en deux en s’arrêtant encore une fois dans le Bas Saint-Laurent.

Le retour en gîtes n’a pas changé notre rythme de lever matinal et nous sommes sur les routes à des heures matinaes inimaginables en temps normal. Il faut d’abord traverser la vallée de la Matapédia qui coupe à travers la base de la Gaspésie pour nous ramener au bord du fleuve, au niveau de l’entrée de la Gaspésie : Sainte-Flavie.

À notre grande surprise, la vallée de la Matapédia est loin d’être abandonnée et nous traversons de nombreux villages. Nous nous traînons également derrière des roulottes au comportement des plus dangereux. Amis pêcheurs, ce bout de pays est sûrement votre paradis, toutes les rivières sont indiquées comme rivières à saumons !

Arrivés au bord du Saint-Laurent, nous prenons à rebours le temps et notre chemin allé puisque nous nous trouvons de nouveau sur la route 132(En fait, à ce moment, nous arrivons de la route 132 sur la route 132. Paradoxe provoqué par le fait que cette artère fait un “P”.) que nous avons empruntée à l’aller ; nous venons de boucler la boucle gaspésienne, c’est le cas de le dire.

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Kamouraska

Nous arrivons peu de temps après midi à Kamouraska, notre halte, et nous sommes immédiatement séduits par le charme des lieux. Un ami nous a régulièrement évoqué son plaisir à aller là-bas, lui dont la famille est originaire de ce beau coin de pays, et nous le comprenons bien. Malgré un temps qui s’est remis à la pluie (persistante), nous voyons que cette ville a beaucoup à offrir, contrairement à Carleton sous les mêmes conditions.

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Kamouraska

Les maisons, construites fin XIXe - début XXe par l’aristocratie québécoise qui se rendait là en villégiature (à l’apparition même du concept !) ont un charme que nous n’avons rencontré nulle part ailleurs. Un petit musée nous fait découvrir l’histoire de cette ville qui compta à l’heure du train 6000 âmes, alors qu’il n’en reste plus que 600. Pourtant, Kamouraska ne donne pas l’impression de péricliter même s’il est certain que hors saison touristique, les activités économiques sont peu nombreuses. Nous allons ensuite longer le Saint-Laurent à pied, malgré une bruine persistante. Nous regrettons de ne pas profiter d’une météo plus clémente et d’un peu plus de temps libre pour découvrir ce coin de pays somme toute assez méconnu. La visibilité sur Charlevoix est également très limitée ; elle s’avèrera nulle le lendemain matin, perdue dans la brume.

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Kamouraska

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Kamouraska

Repas du midi : McDo, c’est ça que j’M

Repas du soir : restaurant de l’auberge. Vraiment succulent, dans le magnifique solarium donnant sur le fleuve. Le lendemain matin, nous y (petit-)déjeûnons aussi : oeufs bénédictines ou crêpes aux fruits, un délice.

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Kamouraska

Dodo : L’Auberge des îles. Belle et accueillante ; seul hic à l’affaire, nous avons malheureusement hérité d’une chambre avec deux lits séparés sans en avoir été prévenus. Mais c’était bien le seule bémol.


Le lendemain matin nous prenons la route tôt sous un grand ciel bleu, mais brumeux, et un vent puissant. À nous l’autoroute, oubliée depuis si longtemps. Un retour à la vie rapide, la vie urbaine. En tout début d’après-midi la voiture est rendue à sa propriétaire, Maman Papillon, et nous arrivons peu de temps après à Montréal, contents de notre séjour revitalisant.

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Kamouraska

Le journal local de Lanaudière nous apprend au passage qu’un phoque a été vu à Saint-Sulpice, photo pleine page à l’appui. C’était bien la peine d’aller aussi loin pour en voir ;)

En l’absence de mon homme, je me trouve à être seule, le soir, à la maison.

Hier vers 23h, je décide qu’il est temps pour moi d’aller dormir. Je ferme le couvercle de mon iBook, éteint la lumière et me dirige nonchalemment vers la chambre, en direction du lit.

C’est alors que mon attention est attirée par des mouvements vaguement discernés dans le noir, sur le balcon. Avec du bruit. S’il s’agit d’une hallucination, elle est complexe, à la fois visuelle et auditive. Et collective, car les minettes semblent très intéressées également à ce qui se passe de l’autre côté de la fênetre et qu’elles distinguent visiblement mieux que moi…

Apeurée et prise de panique, le coeur battant à 200 à l’heure, je retourne sur mes pas en direction de notre unique téléphone, prête à composer le 911 d’office. Ou alors à me sauver par la porte d’en avant. J’hésite entre les deux éventualités.

Quand tout d’un coup, les sens décuplés par l’adrénaline, j’entends dans l’assourdissant silence de la nuit… un bruit distinctif que je reconnaîtrais parmi mille. Même au travers d’une fenêtre fermée.

C’est celui d’un miaulement de chat.

Non complètement rassurée par l’identification d’un bruit connu (ce pourrait être un leurre !), je m’approche à nouveau à pas de loup de la fenêtre et de la porte arrière. Au fur et à mesure, le bruit se fait plus insistant. C’est bien un miaulement, il n’y a pas de doute, ou à tout le moins l’imitation de. Mon premier réflexe, bien que je vienne de voir les deux chattes sur le bord de la fenêtre, est de vérifier qu’elles y sont toujours et que je n’en ai pas “enfermé” une sur le balcon par mégarde.

Ensuite, dans un geste de courage inouïe, j’allume la lumière du balcon arrière pour découvrir…

Ô horreur, ô malédiction…

Un petit chat noir sur le balcon.

Mais attention ! Pas de méprise ! Ce n’est pas notre petit chat noir habituel, mais bien un autre.

Je me frotte les yeux, mais la réalité (ou est-ce ma perception de cette dernière ?) demeure inchangée.

Non seulement y a-t-il un chat noir sur le balcon, mais en plus, il miaule et se promène frénétiquement dans tous les sens. De toute évidence, il veut entrer chez nous. Et nos minettes ne sont pas trop sûres d’en avoir envie.

Kesako ? Le diable en personne qui s’invite à ma porte ? Le chat d’un ancien propriétaire qui revient sur les lieux, des années plus tard après un déménagement ? Un chat du voisinnage (mais je ne l’ai jamais vu) qui se trompe de domicile ? Un chat qui a contracté la rage d’un raton laveur en Montérégie et qui veut furieusement contaminer nos chattes ? Ou les engrosser (mais elles sont stérilisées et ne produisent donc normalement plus trop de petites phéromones attirantes…) ? Les possibilités se multiplient et sont toutes aussi plausibles les unes que les autres, il va sans dire.

Dans un instant d’illumination soudaine, je me prends de pitié pour la petite bête sans défense que je ne peux même pas laisser entrer ici sous peine de ne plus reconnaître Safran pour les 10 prochaines années, minimum. Vous connaissez ces moments de rare clairvoyance où l’on comprend soudain toutes les notions qui nous sont pourtant obscures le reste du temps… C’est dans un tel éclair d’intelligence que je me dis que la Chose, enfin l’Animal, a peut-être faim.

Alors je le gratifie des délicieuses croquettes légères dont nos minettes raffolent tant. Non sans diverses contorsions rocambolesques m’ayant mené à marcher sur les murs et au plafond pour m’assurer que rien de plus n’entre dans l’appartement, pas même un atome d’air, tandis que les croquettes généreusement tendues à bout de bras en sortent.

Mission accomplie. Mais la chose noire miaulante ne semble pas intéressée et va me casser les oreilles pendant plusieurs longues minutes.

Peu importe. Un bâillement soudain chasse toutes mes émotions et je m’en désintéresse aussitôt pour aller plonger dans les bras de Morphée, à défaut des bras de quelqu’un d’autre (c’est qu’il est un peu loin).

Je suis saine et sauve pour ce soir.

La psychiatrie rend-elle fou celui qui la pratique ? Mais non, voyons donc !

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Aucun phénomène paranormal à relater pour ce soir, à date. Mais les extra-terrestres ne sont pas loin pour autant. Ils réessaieront de communiquer avec moi d’une autre manière tout aussi inattendue. Mais ils ne réussiront pas à me faire perdre la tête, je le jure !

J’ai seulement cuisiné un pain aux bananes à partir des fruits qui commençaient à se perdre dans le panier :)

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Pain aux bananes / Banana Bread

Les nuages menaçant de la veille sont encore là au réveil et visiblement se trouvent bien là. Inutile d’envisager une sortie supplémentaire près dans Percé ou près du Rocher, on n’y verra rien et on se fera tremper. Autant prendre la route vers Maria et Carleton-sur-Mer, en espérant un temps plus clément dans la Baie des Chaleurs.

La route est d’ailleurs assez longue, donc autant profiter du mauvais temps pour rouler. Nous allons de villages en villages le long d’une côte visiblement très accueillante mais sous un temps pourri. Les villes qui attirent le plus notre attention, mais où nous ne nous arrêtons pas, sont Bonaventure et New Carlisle, avec ses bornes fontaines décorées de façon toutes plus originales les unes que les autres.

La situation météorologique n’a pas changé lorsque nous arrivons, un peu avant midi, à Carleton-sur-Mer : pluie, vent, froid, tout y est réuni, on se croirait en novembre pas mauvais temps. Nous essayons de braver les éléments et d’aller sur la plage. Peine perdue, nous n’arrivons pas à passer plus de 10 minutes dehors sans avoir froid et se faire mouiller.

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Carleton-sur-Mer et son gigantesque barachois

Nous nous décidons finalement à aller manger, ce qui est relaté plus bas et mérite d’être lu. Ensuite, au désespoir, nous nous rendons à notre gîte, mais il est encore trop tôt. Finalement, faute de mieux, nous décidons d’aller au sommet du Mont Saint-Joseph, LA montagne du coin. Hors de question de faire une randonnée cependant, le temps est bien trop affreux. Ce sera en voiture. D’en haut, un beau point de vue s’offre sur Carleton, mais le temps est tellement pourri que ça gâche tout et qu’on a du mal à y trouver le moindre charme. Par ailleurs, deux usines plombent l’horizon de la Baie des Chaleurs de leurs cheminées fumantes.

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Carleton-sur-Mer, vue du Mont-Saint-Joseph

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Carleton-sur-Mer, vue sur la Baie-des-Chaleurs

Finalement, nous retournons à l’auberge pour y faire une sieste, une vraie honte de si mal profiter du peu de temps qui nous est alloué !

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Carleton

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Carleton

À notre réveil, le temps s’éclaicit donc nous saisissons l’occasion pour ressortir le bout de notre nez. Un premier arrêt dans petit parc ornithologique où trônent de fières mouettes et d’élégantes hirondelles. Ensuite, nous allons sur le barachois, le plus grand de la région, une avancée de terre sur l’eau (et sa petite baie peu profonde) provoquées par la nature. L’environnement de la Baie des Chaleurs accepte finalement de se montrer sous un jour un peu plus accueillant.

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Carleton

Cependant, ce coin de pays se sera montré comme le plus décevant de notre voyage. Bien qu’il soit certain que le temps n’a rien aidé, nous ne voyons pas trop ce qui aurait pu nous plaire ou ce qui nous aurions pu y faire, même avec du beau temps. Finalement, seule les bornes fontaines de New Carlisle valaient le détour - avoir su nous aurions pris le temps de les photographier une à une !

Repas du midi : Le Héron. Franchement catastrophique. Il aura fallu 45 minutes pour servir deux plats de bases. Dans un décor d’un goût douteux avec un service nonchalant à souhait, nous avons eu droit à une erreur de service, une poutine limite et une salade de crevettes noyée dans la mayonnaise, sûrement histoire de masquer le goût du reste. À éviter !

Repas du soir : Restaurant Le Barlicoco. Nous y sommes arrivés alors que tout le monde était parti. Bonne cuisine, simple mais avec de bons ingrédients, un peu cher malgré tout, comme partout en Gaspésie finalement…

Dodo : Gîte du Patrimoine. Difficile de faire plus kitsch, mais l’ensemble est cohérent. Cette vaste demeure est couverte de bois à l’intérieur, plafond compris. Les chambres sont qualifiées par leur couleur, ce qui laisse présager du choc visuel (encore heureux, nous n’avons pas hérité de la chambre rose). Cependant l’accueil est très bon et le petit déjeuner était aussi délicieux (cuisine maison de A à Z). À recommander !